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Message déposé par Le ciel est par dessus le toit le 22/10/2024 à 07:36.

AVERTISSEMENT

POUR LA PRÉSENTE ÉDITION.

Vollaire a quatre-vingt-deux ans, et, en dépit de l’âge, les projets de tragédie fermentent encore dans sa tôte. Le 15 décembre 1776, il écrit au comte d’Argental : « Je me démêlerai peut-être aussi des affaires très-embrouillées et très-mal conduites de notre pauvre petit pays de Gex ; mais je ne me tirerai pas si bien de l’entreprise dont M"^ de Saint-Julien vous a donné si bonne opinion. Si ce n’est pas elle qui vous en a parlé, c’est l’abbé iMignot. Le commencement de l’ouvrage me donnait à moi-même de très-grandes espérances ; mais je ne vois sur la fin que du ridicule. J’ai bien peur ([u’on ne so moque d’une femme qui se tue de peur de coucher avec le vainqueur et le meurtrier de son mari, quand elle n’aime point ce mari, et (|u’elle adore ce meurtrier… D’ailleurs, la pièce, roulant uniquement sur le remords continuel d’aimer à la fureur le meurtrier de son mari, ne pouvait comporter cinq actes. J’étais obligé de me réduire à trois, et cela me paraissait avoir l’air d’un drame de M. Mercier. C’est bien dommage, car il y avait (lu neuf dans cette bagatelle, et les passions m’y paraissaient assez bien traitées. Il y avait quelques peintures assez vraies ; mais rien ne répare le vice d’un sujet qui n’est pas dans la nature… Bérénice, qui est le plus mince et le plus petit sujet d’une pièce de théâtre, était beaucoup plus fécond que le mien, comme beaucoup plus naturel. Cela me fâche et m’humilie. Uii père n’est pas bien aise de se voir obligé de tordre le cou à son enfant. Voilà trois mois entiers de perdus, et le temps est cher à mon âge. »

Ce moment de découragement passe vite. Voltaire est rassuré par M""" Denis : « La peur m’a pris quand j’ai relu ma petite drôlerie tragique ; et ma peur a été si grande que je ne voulais pas montrer cet abrégé de tragédie à M""’" Denis. Hier, j’ai surmonté mon dégoût et ma crainte ; je lui ai donné lapièce à lire ; elle a pleuré, et cela m’a rassuré. Quand je dis rassuré, ce n’est pas auprès du parterre : car vous savez qu’à présent votre ville est divisée en factions. J’ai contre moi le parti anglais, le parti juif, le parti dévot, la foule des méchants auteurs, tous les journalistes, et Dieu sait quelle joie quand toute cette canaille se réunira pour siffler un vieux fou qui, dans sa quatre-vingt-troisième année, abandonne toutes ses affaires pour donner un embryon de tragédie au public ! Je suis assez fat pour croire que le rôle de mon impératrice est très-honnête, très-touchant, et même, si on veut,