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année 1772.

dre ; elle esquive la requête ; elle répond que ces pauvres Welches, dont on demandait la liberté, ne sont pas si malheureux qu’on l’a cru. Ne dites pourtant mot, d’ici à six semaines, de la réponse de Catau : car Bertrand ne s’en est pas vanté, il ne l’a montrée à personne. Il a écrit une seconde lettre, le plus éloquent ouvrage qui soit jamais sorti de la tête de Bertrand ; il attend impatiemment l’effet de ce nouveau plaidoyer, et ne désespère pas même du succès. Raton devrait bien se joindre à Bertrand, et représenter à la belle Catau combien il serait digne d’elle de donner cette consolation à la philosophie persécutée : ce serait un beau post-scriptum à ajouter au plaidoyer de l’avocat Belleguier.

Il est inconcevable que vous n’ayez pas reçu l’Éloge de Racine ; il y a plus de quinze jours que l’auteur[1] vous l’a envoyé par Marin. Samedi dernier, sur mes représentations, il en a fait partir un nouveau par la même voie ; j’espère que vous l’aurez enfin, et vous le trouverez tel qu’on vous l’a dit, très-beau. Le chevalier de Chastellux n’a jamais entendu parler de ce curé de Fresne[2] ; mais il ira aux informations, et promptement, et vous en rendra compte lui-même, et sera charmé d’avoir ce prétexte pour vous écrire.

Savez-vous que l’archevêque de Paris n’a pas osé aller à cette belle fête du Triomphe de la foi[3] ? Il s’habillait, dit-on, pour y aller ; je ne sais qui est venu lui dire qu’il faisait une sottise, et il a envoyé dire qu’il ne viendrait pas au curé de Saint-Roch, qui en tombera malade.

C’est un petit abbé de Malide, évêque d’Avranches, qui a eu la platitude de le remplacer. Il a bien prouvé ce jour-là qu’il était tout évêque d’Avranches.

Adieu, mon cher ami ; mes compliments très-tendres à l’avocat Belleguier, et mes sincères embrassements à Raton. Tuus ex animo.

8740. — À M. D’ALEMBERT.
18 janvier.

On ne peut faire une aumône de cinquante louis plus plaisamment ; on ne peut se moquer d’un sot avec plus de noblesse. Ce trait, mon cher ami, figurera fort bien dans l’Histoire de l’Académie, qui sera moins minutieuse que celle de Pellisson, et qui ne sera pas pédante comme celle de d’Olivet.

Je me garderai bien de rien offrir, en mon propre et privé nom, à Christophe[4] ; il me dirait : Que ton argent périsse avec toi ! Alors il jouerait le beau rôle, et j’en serais pour mon ridicule.

  1. La Harpe voyez lettres 8722 et 8735.
  2. Voyez lettre 8730.
  3. Voyez lettre 8752.
  4. Voyez page 275.