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ANNÉE 1771.

un impie très-utile à la bonne cause, malgré tout son bavardage.

À propos de la bonne cause, je me mets toujours à vos pieds et sous votre protection. On me reprochera peut-être de n’être pas plus attaché à Ganganelli qu’à Moustapha ; je répondrai que je le suis à Frédéric le Grand et à Catherine la Surprenante.

Daignez, sire, me conserver vos bontés pour le temps qui me reste encore à faire de mauvais vers en ce monde.

Le vieux Ermite des Alpes.
8227. — À M. LE COMTE DE LA TOURAILLE[1].
1er mars.

Les cadets, monsieur, ne doivent point marcher devant les aînés. Laissez-moi, s’il vous plaît, l’honneur qui m’appartient. J’ai soixante-dix-sept ans. Vous vous vantez d’avoir la goutte, comme si je ne l’avais pas ! Êtes-vous entouré, comme moi, d’une circonférence de cinquante lieues de neiges, qui vous rendent absolument aveugle pendant quatre mois de l’année ? C’est bien à vous vraiment à parler de partir avant moi ! Non, monsieur, nous ne verrons point, dans le pays où nous allons, les Frérons et les Desfontaines dont vous parlez ; ils sont dans le Tartare avec Sisyphe, et nous irons dans les champs Élysées converser avec Horace et Tibulle.

Vous comptez parmi vos maux l’absence de mon bienfaiteur[2] ; c’est encore une conformité que j’ai avec vous, et celle qui m’est la plus sensible.

Quand vous serez quitte de votre goutte, monsieur, je vous supplie de me mettre aux pieds de Monseigneur le prince de Condé.

Le vieil Ermite de Ferney.
8228. — À M. D’ALEMBERT.
2 mars.

Mon cher philosophe ne m’a point répondu quand je lui ai demandé[3] s’il avait reçu trois volumes par la voie de M. Marin ; le prie instamment de vouloir bien m’en informer. Je hasarde

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Choiseul.
  3. Lettre 8207.