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lutente, et son appétit augmenta. Ce n’est point au fascia lata que cette tumeur nouvelle a percé, c’est près des muscles intérieurs. Le chirurgien alors s’est avisé de lui demander si, quelque temps avant de tomber malade, il n’avait pas mérité la vér… Il a répondu qu’il avait eu affaire dans Genève à quelques créatures qui pouvaient la donner, mais nul symptôme avant-coureur de cette maladie. Tout se réduit à cette espèce de sciatique. Aucune dartre, aucun bubon, aucune tache, nulle enflure aux aines, sinon l’enflure présente, qui va de l’os des îles au pied. La chair de ces parties n’a plus de ressort, le doigt y laisse un creux ; le pus coule par la nouvelle ouverture, et cependant l’appétit augmente. Il faut quatre personnes pour le porter d’un lit à l’autre. L’atrophie n’est point sur le visage, la parole est libre et quelquefois assez ferme.

Voilà son état depuis quatre mois entiers que l’opération fut faite. J’ajoute encore que le coccix est écorché, mais que le peu de sanie qui en sort n’est point de la qualité du pus fétide de la cuisse. On ne sait si on hasardera le grand remède.

Pardonnez, monsieur, ce long exposé ; daignez me communiquer vos lumières. Que pensez-vous des dragées de Kayser ? et croyez-vous que Colomb nous ait rendu un grand service par la découverte de l’Amérique ?

Je suis avec toute l’estime qu’on vous doit, et j’ose dire avec amitié, monsieur, votre, etc.


4414. — À M.  THIERIOT.
11 janvier.

Reçu le Monde[1] et la Lettre du primat[2] des Gaules ; il y a plus de deux mois, mon cher ami, que j’ai chez moi cette Lettre in-4° marginée. Sachez qu’en poursuivant frère Berthier, je suis fort bien auprès de mon primat, très-bien avec mon évêque ; qu’incessemment je serai le favori de l’archevêque de Paris ; et, si vous me fâchez, je le serai du pape.

Reçu encore la Théorie de l’Impôt, théorie obscure, théorie (qui me paraît absurde ; et toutes ces théories viennent mal à propos pour faire accroire aux étrangers que nous sommes sans ressource, et qu’on peut nous outrager et nous attaquer impunément. Voilà de plaisants citoyens et de plaisants amis des hommes !

  1. Ouvrage de Bastide ; voyez lettre 4323.
  2. Lettre de M. l’archevéque de lyon (Moutazet) à M. l’archevêque de Paris (Chr. de Beaumont), 1760, in-4° et in-12.