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seconde main n’a pas le droit de s’exprimer comme celui qui rapporte ce qu’il a vu et ce qu’il a fait ; que c’est un ridicule, et non une beauté, de vouloir peindre avec toutes leurs nuances les portraits des gens qu’on n’a point connus ; enfin il y avait cent choses utiles à dire, qu’on n’a point dites encore ; mais j’étais pressé et j’étais malade, j’étais accablé de cette maudite Histoire générale[1] que vous connaissez. Je vous demande pardon de vous avoir si mal servi. S’il était temps, je pourrais vous donner quelque chose de mieux ; mais, ne pouvant répondre d’un jour de santé, je ne peux répondre d’un jour de travail. Je ne connais point le Dictionnaire[2] ; je n’ai point souscrit. Je courais le monde quand vous avez commencé ; je l’achèterai quand il sera fini. Mais je fais réflexion qu’alors je serai mort ; ainsi je vous prie de proposer à Briasson[3] de m’envoyer les volumes imprimés ; je lui donnerai une lettre de change sur mon notaire.

Ce qu’on m’a dit des articles de la théologie et de la métaphysique me serre le cœur. Il est bien cruel d’imprimer le contraire de ce qu’on pense.

Je suis encore fâché qu’on fasse des dissertations, qu’on donne des opinions particulières pour des vérités reconnues. Je voudrais partout la définition et l’origine du mot, avec des exemples.

Pardon, je suis un bavard qui dit ce qu’il aurait dû faire, et qui n’a rien fait qui vaille. Si on met votre nom dans un dictionnaire, il faudra vous définir le plus aimable des hommes. C’est ainsi que pense le Suisse V.


3244. — À M. LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU.
Aux Délices, 10 octobre.

Souvenez-vous, mon héros, que, dans votre ambassade à Vienne, vous fûtes le premier qui assurâtes que l’union des maisons de France et d’Autriche était nécessaire, et que c’était un moyen infaillible de renfermer les Anglais dans leur île, les Hollandais dans leurs canaux, le duc de Savoie dans ses montagnes, et de tenir enfin la balance de l’Europe.

  1. Voyez tome XI, l’Avertissement de Beuchot en tête de L’Essai sur les Mœurs.
  2. Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des Sciences, Arts, et Métiers ; voyez la note, tome XXIV, page 132.
  3. Libraire à qui est adressée plus haut la lettre 3119.