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roi de Prusse et l’évêque de Liège, toute petite qu’elle est, peut être très-funeste aux courriers. Je vous avais mandé ce que vous saviez déjà, que le roi était dans le dessein d’acheter vos bustes, et que, grâce à Thieriot, vous les vendriez la moitié moins que vous ne vouliez[1].

Adieu, mon cher ami ; après avoir vu le roi de Prusse, il ne me manque plus que vous. J’espérais bien que vous verriez aussi ce que c’est qu’un roi fait homme ; mais la destinée en a décidé autrement.


1346. — À M. DE MAUPERTUIS.
À la Haye, ce 18 de septembre.

Je vous sers, monsieur, plus tôt que je ne vous l’avais promis ; et voilà comme vous méritez qu’on vous serve. Je vous envoie la réponse de M. Smith[2] ; vous verrez de quoi il est question.

Quand nous partîmes tous deux de Clèves, et que vous prîtes à droite, et moi à gauche, je crus être au jugement dernier, où le bon Dieu sépare ses élus des damnés. Divus Federicus vous dit : Asseyez-vous à ma droite, dans le paradis de Berlin ; et à moi : Allez, maudit, en Hollande.

Je suis donc dans cet enfer flegmatique, loin du feu divin qui anime les Frédéric, les Maupertuis, les Algarotti. Pour Dieu, faites-moi la charité de quelques étincelles dans les eaux croupissantes où je suis morfondu ! Instruisez-moi de vos plaisirs, de vos desseins. Vous verrez sans doute M. de Valori ; présentez-lui, je vous en supplie, mes respects. Si je ne lui écris point, c’est que je n’ai nulle nouvelle à lui mander : je serais aussi exact que je lui suis dévoué, si mon commerce pouvait lui être utile ou agréable.

Voulez-vous que je vous envoie quelques livres ? Si je suis encore en Hollande, à la réception de vos ordres, je vous obéirai sur-le-champ. Je vous prie de ne me pas oublier auprès de M. de Keyserlingk.

Mandez-moi, je vous prie, si l’énorme monade de Wolffius argumente à Marbourg, à Berlin, ou à Halle,

Adieu, monsieur ; vous pouvez m’adresser vos ordres à la Haye. Ils me seront rendus partout où je serai, et je serai par toute terre à vous pour jamais.

  1. Voyez la fin de la lettre 1317.
  2. Physicien anglais cité dans la lettre du 30 juin 1739 à Thieriot, et dans celle du 10 août 1741, à Maupertuis.