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NOMBRE.

leurs pareils en citant les monuments publics, à propos de l’inscription d’une statue que saint Justin, lequel assurait l’avoir vue à Rome, disait être dédiée à Simon le Magicien, et qui l’était à un Dieu des anciens Sabins[1].

Au reste, on ne sera point étonné de ces incertitudes, si l’on fait attention que Jésus ne fut connu de ses disciples qu’après qu’il eut reçu le baptême de Jean. C’est expréssement à commencer depuis ce baptême que Pierre veut que le successeur de Judas rende témoignage de Jésus ; et, selon les Actes des apôtres[2], Pierre entend parler de tout le temps que Jésus a vécu avec eux.



NOMBRE[3].


Euclide avait-il raison de définir le nombre : collection d’unités de même espèce ?

Quand Newton dit que le nombre est un rapport abstrait d’une quantité à une autre de même espèce, n’a-t-il pas entendu par là l’usage des nombres en arithmétique, en géométrie ?

Wolf dit : Le nombre est ce qui a le même rapport avec l’unité qu’une ligne droite avec une ligne droite. N’est-ce pas plutôt une propriété attribuée au nombre qu’une définition ?

Si j’osais, je définirais simplement le nombre : l’idée de plusieurs unités.

Je vois du blanc : j’ai une sensation, une idée de blanc. Je vois du vert à côté. Il n’importe que ces deux choses soient ou ne soient pas de la même espèce, je puis compter deux idées. Je vois quatre hommes et quatre chevaux, j’ai l’idée de huit : de même trois pierres et six arbres me donneront l’idée de neuf.

Que j’additionne, que je multiplie, que je soustraie, que je divise, ce sont des opérations de ma faculté de penser que j’ai reçue du Maître de la nature ; mais ce ne sont point des propriétés inhérentes au nombre. Je puis carrer 3, le cuber ; mais il n’y a certainement dans la nature aucun nombre qui soit carré ou cube.

Je conçois bien ce que c’est qu’un nombre pair ou impair ; mais je ne concevrai jamais ce que c’est qu’un nombre parfait ou imparfait.

Les nombres ne peuvent avoir rien par eux-mêmes.

  1. Voyez les articles Adorer et Éclipse.
  2. Chapitre i, v. 22. (Note de Voltaire.)
  3. Article ajouté, en 1774, dans l’édition in-4o des Questions sur l’Encyclopédie. (B.)