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[triforium]
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des piles, comme à la cathédrale d’Amiens. Le contre-fort C porte la colonne D qui reçoit les têtes des arcs-boutants[1]. Le collatéral était couvert par des combles en pavillon, avec chéneau E, afin de permettre d’ouvrir les jours dans la cloison G[2].

L’exemple le plus complet et le plus développé peut-être du triforium, se reliant absolument à la fenêtre supérieure, se trouve à Sées, dans le chœur de la cathédrale, dont la construction date de 1270 environ[3]. Ce monument, conçu d’une manière très-savante, mais mal fondé, sur un mauvais sol, a beaucoup d’analogie avec le chœur de l’église de Saint-Ouen de Rouen. Les défauts de structure, qui en ont compromis la durée, tiennent à une exécution insuffisante, faute de ressources probablement. Au point de vue de la théorie, le chœur de la cathédrale de Sées dépasserait même en valeur celui de l’église abbatiale de Saint-Ouen, s’il eût été fondé sur un bon sol, et si les matériaux eussent été convenablement choisis et d’une résistance proportionnée aux charges qu’ils ont à porter[4].

La figure 15 donne le triforium d’une des travées parallèles du chœur de la cathédrale de Sées. L’archivolte A du collatéral est surmontée d’un gâble, derrière le rampant duquel s’amorcent les colonnettes qui composent la claire-voie du triforium et la fenêtre haute. L’ordonnance de cette partie supérieure commence donc immédiatement au-dessus des archivoltes (voy. Travée, fig. 11) ; et, dès le niveau B, les sections de l’arcature du triforium et des meneaux des fenêtres sont indiquées. Une seule dalle C, qui fait appui des fenêtres, recouvre la galerie du triforium et sert de chemin de ronde extérieur au-dessus de cette galerie. Comme à Saint-Denis, comme dans le chœur de la cathédrale d’Amiens, la claire-voie vitrée extérieure D n’est pas semblable à la claire-voie intérieure, ce qui est fort bien calculé ; car si les formes des arcatures à jour sont pareilles à l’extérieur et à l’intérieur, il en résulte en perspective des superpositions de lignes d’un mauvais effet. Au contraire, ces arcatures étant différentes, l’œil les sépare assez naturellement, et les intersections des courbes produisent des combinaisons variées et riches. À Sées, comme à Saint-Ouen de Rouen, ce n’est plus un bahut plein, mais une balustrade à jour qui forme appui de la galerie, de sorte que, pour les personnes placées sur le sol inférieur, les vitraux de la claire-voie postérieure D se voient à travers cette balustrade. L’intention d’ajourer de plus en plus les travées au-dessus des collatéraux,

  1. Voyez Architecture Religieuse, fig. 36.
  2. Pour se rendre compte de la position de ce triforium au droit des piles, voyez l’article Trait, fig. 4.
  3. Voyez Travée, fig. 11.
  4. Les fondations du chœur de la cathédrale de Sées ne sont que des maçonneries appartenant à un monument beaucoup plus ancien, sur lesquelles les constructions sont appuyées tant bien que mal, et ces fondations mal maçonnées ne sont pas établies sur le sol résistant. Évidemment il y a eu là une nécessité d’économie.