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[transsept]
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Les jolies églises d’Auvergne, bâties toutes à peu près sur le même patron, vers 1100[1], nous fournissent plusieurs exemples de plans avec transsept très-judicieusement conçus. Le plan (fig. 3) de l’église d’Issoire sort des données primitives quant à la disposition du transsept. Sur les quatre piles de la croisée sont bandés quatre arcs-doubleaux qui portent, dans les angles, des trompillons arrivant à l’octogone ; sur cet octogone s’élève une voûte en coupole, contre-butée latéralement en a et b par des demi-berceaux[2] ; au-dessus de la coupole se dresse un clocher. Le sanctuaire A est relevé de quelques marches au-dessus du pavé du transsept et du collatéral circulaire. Deux degrés descendent dans une crypte. Les fidèles avaient accès partout, hormis dans le sanctuaire, et, par le fait, les deux croisillons c, d, ne sont que les appendices des chapelles orientées e, f. Ce plan, si bien conçu, devait donner, en élévation, un motif d’une grande originalité et qui sortait des données admises jusqu’alors.

Voici (fig. 4) la vue perspective de l’abside de l’église d’Issoire avec son transsept. On voit que les deux extrémités du bras de croix, au droit des chapelles orientées, ne s’élèvent pas au-dessus de la nef et de l’abside ; mais les deux parties a, b, du plan, qui reçoivent les demi-berceaux destinés à contre-buter la coupole, forment un premier gradin, d’un grand effet, qui conduit l’œil au deuxième gradin enfermant la coupole et portant le clocher central. Malheureusement, ces parties supérieures ont été alourdies et défigurées à différentes époques, mais il est aisé de reconnaître, sur le monument même, et par l’examen des constructions, la disposition primitive sous les superfétations qui lui ôtent une partie de sa grâce. Des matériaux de diverses couleurs forment, en certaines places, des mosaïques qui donnent de la finesse et de l’élégance à cette structure adroitement étagée. Les plans auvergnats firent école et eurent des imitateurs jusque dans le Nivernais, au nord ; jusque dans le Limousin et le Languedoc, au sud. Toutefois, dans ces dernières provinces méridionales, ces imitations ne paraissent s’être appliquées qu’à des églises abbatiales.

La plus importante de toutes est, sans contredit, la célèbre église de Saint-Sernin (Saint-Saturnin), de Toulouse, dont le chœur et le transsept datent du commencement du XIIe siècle.

La figure 5 donne en A la moitié du plan de son abside avec le transsept et l’amorce de la nef. Ici le transsept n’est plus réservé aux religieux, ceux-ci se tenaient dans le chœur placé en C, tandis que l’autel était établi en a sur la crypte renfermant le tombeau de Saint-Saturnin. En b était un autel de retro, réservé à certaines solennités. Aux deux extrémités nord et sud du transsept sont percées de larges

  1. Notre-Dame du Port, Saint-Nectaire, Issoire, Ébreuil ; l’église Saint-Étienne de Nevers doit être rangée parmi les monuments religieux de cette belle école auvergnate.
  2. Voyez Architecture Religieuse, fig. 10 bis.