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lovingiens laissent apercevoir des traces de stucages sur des voûtes et même sur des chapiteaux[1].

Plus tard les stucs ne furent plus que de très-délicates applications d’ornements, de treillis, de quadrillés fleuronnés, sur des surfaces unies, afin d’en réchauffer la nudité. (Voy. Application.)

STYLE, s. m. Il y a le style, il y a les styles. Les styles sont les caractères qui font distinguer entre elles les écoles, les époques. Les styles d’architecture grecque, romaine, byzantine, romane, gothique, diffèrent entre eux de telle sorte, qu’il est aisé de classer les monuments produits de ces arts divers. Il eût été plus vrai de dire : la forme grecque, la forme romane, la forme gothique, et de ne pas appliquer à ces caractères particuliers de l’art le mot style ; mais l’usage s’étant prononcé, on admet : le style grec, le style romain, etc.

Ce n’est pas de cela qu’il s’agit ici ; nous avons fait ressortir dans plusieurs articles du Dictionnaire les différences de style qui permettent de classer par époques et par écoles les œuvres de l’architecture du moyen âge.

Nous ne parlerons donc que du style qui appartient à l’art pris comme conception de l’esprit. De même qu’il n’y a que l’art ; il n’y a que le style. Qu’est-ce donc que le style ? C’est, dans une œuvre d’art, la manifestation d’un idéal établi sur un principe.

Style peut s’entendre aussi comme mode ; c’est-à-dire appropriation d’une forme de l’art à l’objet. Il y a donc le style absolu, dans l’art, et le style relatif. Le premier domine toute conception, et le second se modifie suivant la destination de l’objet. Le style qui convient à une église ne saurait convenir à une habitation privée : c’est le style relatif ; mais une maison peut laisser voir l’empreinte d’une expression d’art (tout comme un temple ou une caserne) indépendante de l’objet et appartenant à l’artiste ou plutôt au principe qu’il a pris pour générateur : c’est le style.

Dans les arts, et dans l’architecture en particulier, les définitions vagues ont causé bien des erreurs, ont laissé germer bien des préjugés, enraciner bien des idées fausses. On met un mot en avant, chacun y attache un sens différent. Des raisonnements qui ne peuvent jamais se croiser s’élèvent sur ces bases mal assises, n’avancent pas les questions d’un degré, embarrassent les indécis et nourrissent les esprits paresseux[2].

  1. Les gros chapiteaux de l’ancien narthex de Saint-Remi de Reims, ceux de la crypte de Saint-Laurent de Grenoble, et même des chapiteaux de l’abside de l’église d’Issoire, sont de simples corbeilles de pierre couvertes de figures et d’ornements de stuc.
  2. On pourrait citer comme exemple, un de ces mots aimés des amateurs d’art et sur lequel on n’a jamais pu s’entendre, par une bonne raison, c’est qu’il n’a pas de sens. Il n’est pas de critique d’art qui, en parlant de la peinture, ne trouve à placer le mot clair-obscur. Qu’est-ce qu’un clair-obscur ? S’il s’agit de la répartition de la lumière et des ombres sur un tableau, pourquoi ne pas dire tout simplement le modelé, mot qui exprime énergiquement les transitions de la lumière aux ombres. S’il s’agit, comme