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de l’église de Toul, etc. (Voy., pour les dispositions d’ensemble des crochets, Chapiteau, Corniche, Fleuron, Gâble, Pignon, Pinacle.).

Nos lecteurs trouveront peut-être que nous donnons à un détail d’ornement une importance exagérée ; mais ils voudront bien considérer qu’en ceci les sculpteurs de l’époque qui nous occupe particulièrement ont été créateurs : ils n’ont été chercher nulle part des modèles dans les arts antérieurs ; rien de pareil dans la sculpture romaine dont ils possédaient des fragments, ni dans la sculpture orientale qu’ils étaient à même de voir et d’étudier. Si nous avons donné un grand nombre d’exemples de ces crosses ou crochets, c’est que nous avons toujours entendu exprimer aux architectes étudiant l’architecture gothique la difficulté qu’ils éprouvaient, non-seulement à composer et faire exécuter cet ornement, si simple en apparence mais d’un caractère si tranché, mais encore à dessiner les crochets qu’ils avaient devant les yeux. Dans un style d’architecture, il n’y a pas, d’ailleurs, de détail insignifiant : la moindre moulure, l’ornement le plus modeste, ont une physionomie participant à l’ensemble, physionomie qu’il faut étudier et connaître.

CROIX, s. f. Crois. Pendant le moyen âge, on plaçait des croix de pierre ou de métal au sommet des édifices religieux, sur les chemins, à l’entrée des villes et dans les cimetières. Il est bon d’observer, tout d’abord, que l’image du Christ ne fut suspendue à la croix que vers le VIe ou VIIe siècle ; jusqu’alors, l’instrument de supplice, devenu sous Constantin le signe symbolique des chrétiens, fut représenté nu. Dans les catacombes de Rome, il existe des représentations de la croix, ornée de gemmes ; aux deux bras sont suspendues des lampes. Mais nous ne pensons pas qu’il existe une seule représentation peinte ou sculptée du crucifix avant le VIe siècle, et encore, à dater de cette époque jusqu’au XIIe siècle, ces images sont-elles fort rares (voy. Crucifix). Nous n’avons à nous occuper, dans cet article, que des croix qui tiennent à l’architecture, qui sont attachées à des monuments, ou qui constituent elles-mêmes de petits monuments isolés.

croix attachées aux édifices religieux. Ces croix sont de trois sortes : croix sculptées dans la pierre, croix de métal et croix peintes.

Les plus anciennes croix sculptées sont presque toujours à quatre branches égales : elles décorent le sommet des pignons, les tympans des portes d’églises, les faces des contre-forts ou des piliers ; on les retrouve aussi parfois dans les chapiteaux et les clefs de voûtes.

L’église cathédrale primitive de Beauvais, connue sous le nom de Basse-œuvre, existait déjà en l’an 990. Cet édifice, qui paraît remonter au VIIIe siècle, présente, sur son pignon occidental, une croix de pierre incrustée dans la maçonnerie, parementée de petits moellons cubiques. Cette croix, que nous donnons (1), est échancrée sur ses bords et munie d’un pied terminé en pointe. Le pignon de l’église du prieuré de Montmille, élevée, dès le commencement du XIe siècle, près de Beauvais, est orné d’une