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LES VOYAGEURS DU XIXe SIÈCLE.
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les moyens de faire une excursion fructueuse au delà des montagnes Bleues, dans la plaine de Bathurst, dont les Européens ne connaissaient encore que trop imparfaitement toutes les ressources.

Ce fut seulement le 20 mars que Duperrey quitta l’Australie. Cette fois, il dirigea sa course vers la Nouvelle-Zélande, qui avait été un peu laissée de côté par ses prédécesseurs, et s’arrêta dans la baie de Manawa, au fond de la vaste Baie des Îles. Des observations de physique, de géographie, des recherches d’histoire naturelle, occupèrent les loisirs des officiers. En même temps, les rapports fréquents de l’équipage avec les naturels jetaient un jour nouveau sur les mœurs, sur les idées religieuses, sur la langue, sur l’état d’hostilité d’un peuple jusqu’alors rebelle à l’enseignement des missionnaires. Ce que ces indigènes avaient apprécié dans la civilisation, c’étaient les armes perfectionnées, qui leur permettaient de donner plus facilement satisfaction à leurs goûts sanguinaires, et, à cette époque, ils en possédaient déjà une grande quantité.

Le 17 avril, la Coquille abandonnait cette relâche, remontait vers la ligne jusqu’à Rotuma, découverte, mais non visitée, par le capitaine Wilson, en 1797. Les habitants, doux et hospitaliers, s’empressèrent de fournir aux navigateurs tous les rafraîchissements dont ils avaient besoin. Mais on ne fut pas longtemps à s’apercevoir que ces naturels, profitant de la confiance qu’ils avaient su inspirer, dérobaient une quantité d’objets, qu’on avait ensuite toutes les peines du monde à leur faire restituer. Des ordres sévères furent donnés, et les voleurs, surpris en flagrant délit, furent fustigés en présence de leurs camarades, qui ne firent que rire plus franchement que les fustigés eux-mêmes.

Parmi ces sauvages se trouvaient quatre Européens, qui avaient, quelque temps auparavant, déserté le baleinier le Rochester. Aussi peu vêtus que les naturels, tatoués et couverts comme eux de poudre jaune, ils n’étaient reconnaissables qu’à leur peau plus blanche et à leur mine plus éveillée. Satisfaits de leur sort, ils s’étaient créé une famille à Rotouma, où ils comptaient bien finir leurs jours à l’abri des soucis, des inquiétudes et des difficultés de la vie civilisée. Un seul d’entre eux demanda à rester sur la Coquille, ce qui lui fut accordé sans difficulté par Duperrey, mais ce que le chef de l’île ne permit qu’en apprenant que deux convicts de Port-Jackson demandaient à débarquer.

Malgré tout l’intérêt qu’offrait aux naturalistes cette population peu connue, il fallait partir. La Coquille releva tout d’abord les îles Coral et Saint-Augustin, découvertes par Maurelle en 1781. Ensuite, ce furent l’île Drummond, dont les habitants, au teint très foncé, aux membres grêles, à la physionomie peu intelligente, vinrent échanger quelques coquilles tridacnes, vulgairement appelées