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Ne nous entretenons que de mots delectables,
Et tous expedions en nos particuliers
Plus de verres de vin qu’ils ne font de cahiers.
Les sages anciens, dont les academies
Ont souvent resveillé nos ames endormies,
Ont dit que nous sentions quatre sainctes fureurs
Agiter nos esprits de leurs douces erreurs :
Les Muses, Apollon, l’enfant que Cypre adore
Et le dieu qui dompta les peuples de l’Aurore.
Qu’aujourd’huy, chers amis, l’amoureuse liqueur
De ce divin nectar agite nostre cœur !
Que ce puissant demon qui preside aux bouteilles
Soit l’unique sujet de nos plus longues veilles !
Et, quand la soif viendra troubler nostre repos,
Courons alaigrement l’esteindre dans ces pots
Plus viste que tous ceux de nostre voisinage
Ne coururent à l’eau pour appaiser la rage
De l’infame Vulcan, dont le traistre element
Embraza de Themis l’orgueilleux bastiment4.
Si ces vieux chevaliers qui couroient par le monde
Ont esté renommez pour une table ronde,
Nous qui suivons l’amour et reverons ses loix,
Faisons tous aujourd’huy de si vaillans exploits
Qu’on appelle en tous lieux ceste trouppe honorée
Les braves champions de la table quarrée5.
Mais c’est trop discourir sur le point d’un assaut ;
Amis, advancez-vous tandis que tout est chaud.



4. Le poète veut parler de l’incendie du Palais en 1618. V. notre tome 2, p. 159.

5. Par opposition à la fameuse table ronde, qu’à cette époque même un cabaretier de Paris prétendoit encore posséder. Il