On n’a pas le loisir de goûter la lumière.
Misérables mortels, combien possédez-vous
Un présent si cher et si doux ?
Retranchez-en le temps dont Morphée est le maître.
Retranchez cas jours superflus
Où notre âme, ignorant son être,
Ne se sent pas encore ou bien ne se sent plus :
Otez le temps des soins, celui des maladies,
Intermède fatal qui partage nos vies.
1 Major e longiquo reverentia. (Tacite.)
2 Voir Lettre ii. Regnard semble avoir parodié cet endroit dans le Joueur :
Que faut-il à la nature humaine ?
Moins on a de richesse et moins on a de peine :
C’est posséder les biens que savoir s’en passer.
3 Voir Lettre xci.
Æstuat infelix angusto in limite mundi. (Juvénal.)
Maître du monde entier s’y trouvait trop serré. (Boileau.)
4 « L’Écriture a grande raison de dire : les hommes des richesses, viri divitiarum, et non les richesses des hommes, pour montrer que l’avare n’est pas vraiment possesseur de sa fortune, mais qu’il est possédé par elle. » (Saint Ambr., sur Naboth.)
Ce malheureux attendoit
Pour jouir de son bien une seconde vie,
Ne possédoit pas l’or, mais l’or le possédoit.
5 Voir Lettre xlv. De la Clémence, I, iii. Lucrèce, IV, 1154, si bien imité par Molière dans le Misanthrope. La Bruyère, du Cœur : Toutes les passions sont menteuses… (Mallebranche, Recherche de la vérité, l. I.)
6 N’y a-t-il pas là comme une image de l’homme-Dieu des chrétiens ?
7 « Car nous n’avons pas ici de cité permanente. » (Saint Paul.)
8 Ninon de L’Enclos, en danger de mourir à vingt -deux ans, répondait à ses amis qui déploraient sa destinée : « Ah ! je ne laisse au monde que des mourants. »
9 Voir Lettres I et xxiv. Montaigne, I, 19. Deshoulières. Réflexions diverses.
10 Peregrini et hospites super terram. (Saint Paul, Hebr., xi, 13.)