Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/660

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

évacuation de matière extrêmement putride ou sanguinolente, ou par la gangrène manifestée souvent par un emphysème général ou partiel dans les bestiaux, ou par des érésypèles malignes & gangreneuses, ou par des charbons, des bubons. des pustules ou taches pourpreuses ; (voyez tous ces mots) ou enfin par une éruption exanthématique quelconque, pour l’ordinaire d’un mauvais caractère : terminaisons qui peuvent servir à établir leurs différentes espèces.


1o. Des moyens préservatifs qu’on peut employer contre la peste.

Empêcher toute communication avec les bestiaux sains & tout ce qui les approche.

Le virus pestilentiel est un protée qui se masque sous différentes formes, & qui pour s’introduire prend mille routes différentes & souvent inconnues. Mais nous ne craignons pas d’avancer qu’il seroit presque impossible qu’une maladie pestilentielle fit des progrès, si chacun avoit le soin d’enfermer son bétail au premier bruit de la contagion. C’est par cette raison que dans les pestes publiques, parmi les hommes, il n’y a ordinairement que ceux qui sont renfermés qui en soient à l’abri. Dans la peste de Marseille, il n’y eut que les religieux bien cloîtrés, les prisonniers enfermés au fond des cachots, & ce fameux Garnier qui fit l’admiration & l’étonnement de tout Marteille, dont les demeures restèrent intactes ; cet horloger, aux premiers bruits de la peste, ayant muré sa porte & fait ses provisions, s’enferma avec une famille nombreuse. Tout son quartier devint désert par les ravages que causa la mortalité dans cette ville. Il voyoit passer, tous les jours sous sa fenêtre, des milliers de cadavres dans des tombereaux. Cela ne l’empêcha pas d’employer utilement son temps. De dix qu’ils étoient lorsqu’il se renferma, il s’en trouva onze à la fin de la maladie ; ce qui fait une aventure unique dans l’histoire des pestes.

MM. Duhamel du Monceau & Fougeroux, de l’académie royale des sciences, en suivant scrupuleusement ces indications, ont conservé les bestiaux de leurs fermiers, qu’une seule muraille séparoit du lieu infecté. M. le Marquis de Courtivron a vu, par des moyens semblables à ceux que nous indiquons, des bestiaux sains renfermés & préservés dans un parc environné de bêtes malades. Dans l’année 1713, les princes Pamphile & Borghèse conservèrent tous leurs bestiaux en interceptant toute communication. Nous avons devers nous des exemples qui doivent encourager les agriculteurs à suivre exactement ces avis. Si nous nous appuyons d’un aussi grand nombre d’autorités, c’est que nous croyons qu’il est, on ne peut pas plus important, de leur prouver combien l’on doit être en garde contre tout ce qui établit une communication immédiate entre les lieux sains & infectés, & qu’il ne faut pas négliger la plus petite circonstance à cet égard.

2o. Pratique des sétons.

Après ce premier soin de renfermer les bestiaux & d’éviter toute communication, ce qui est, sans contredit, le plus sûr de tous les préservatifs, on ne doit pas négliger un