de sorte qu’il est très-possible, à la longue, de convertir ce terrain en un champ passable, qui donnera plusieurs récoltes consécutives en grain. Cependant je préférerois, lorsque le taillis décline, de le renouveler peu à peu par des marcottes.
Si on a planté des pourrettes, on les recèpe après la première & après la seconde année, afin de forcer le pied à se garnir de tiges, de la même manière que les têtes de saule ou d’osier, & on les recèpe encore au besoin, après la troisième année. Cependant si le pied ne pousse que de petites branches chiffonnes & en quantité, il faut en supprimer le plus grand nombre, & ne lui en laisser que trois ou quatre, que l’on recèpera par la suite, lorsqu’elles auront pris une certaine consistance. Ces divers recépages forcent le pied à multiplier, enfoncer & étendre ses racines.
L’entrée de ces taillis doit rigoureusement être défendue aux troupeaux, excepté pendant l’hiver, & encore faut-il que la feuille tombée ait eu le temps de se dessécher, parce qu’elle sert d’engrais. Ce n’est donc que depuis le mois de janvier jusqu’au commencement de mars ou d’avril, suivant le climat, que le parcours sera permis. Après les premières années, la brebis y trouvera une herbe fine & abondante. Je doute qu’il existe un genre de taillis dont l’accroissement soit plus prompt & de produit égal.
§. II. Des haies. Ce que je dis des taillis s’applique, absolument parlant, aux haies faites avec la pourrette, mais la conduite n’en est pas la même. La végétation du mûrier est très-active, & la séve se porte toujours au haut des branches ; dès lors leurs pieds se dégarnissent. Il faut planter la pourrette à dix-huit pouces, & la receper aussitôt après à deux yeux au-dessus du sol : ces deux yeux formeront deux branches ou tiges ; s’il n’en pousse qu’une seule on la recepera de nouveau à deux yeux après la chute des premières feuilles. Aussitôt qu’on le pourra, on inclinera ces tiges encore molles, vers l’horizon, c’est-à-dire, au niveau & presqu’à fleur de terre : c’est de ces tiges que dépendra à l’avenir le fourré de la haie. De ces branches inclinées s’élanceront de nouveaux bourgeons, qu’on inclinera encore en les forçant de former les uns avec les autres, des lozanges très-alongés par les deux bouts, & même en les greffant par approche au point de leur réunion, ainsi qu’il a été dit au mot haie. Enfin, on ne permettra jamais qu’aucune branche soit en ligne droite, parce qu’elle absorberoit peu à peu toute la seve des branches inférieures, & deviendroit un arbre. Cet exemple est frappant dans les haies de mûriers dont les tiges sont droites ; peu à peu le bas se dégarnit, le sommet se charge de branches, il faut receper ces haies par le pied tous les cinq à six ans. Au contraire, en supprimant tout canal direct de la séve, c’est-à-dire, en inclinant chaque branche, & encore mieux en la greffant par approche avec la plus voisine, on est assuré que cette haie subsistera très-longtemps, sans avoir besoin d’être renouvelée. Les soins annuels qu’elles exigent, sont d’être taillées au ciseau, ou au croissant, ou à la serpette, après la tombée des feuilles & avant