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à fruit ou à bois. Quelle doit être la vigueur de ce bouton, si sa mère nourricière est languissante, malade & sans force ! ajoutez encore l’état de l’arbre, & vous trouverez une cause infaillible d’une prochaine destruction.

Si l’on fait actuellement la comparaison de la végétation de l’arbre à plein vent, avec celle de l’arbre en espalier bien conduit, on verra que ce dernier est sans cesse tenu sur bois nouveau, & qu’au lieu de vieillir, l’art vient à bout de le rajeunir. Il n’en est pas ainsi de l’espalier mal conduit, où les branches sont perpendiculaires, où les gourmands fourmillent, où les bourgeons ne naissent plus qu’aux extrémités des branches, &c. ; cet arbre suit, à peu de choses près, la loi de l’arbre à plein vent, & de plus, il est chaque année couvert de plaies mal soignées que la serpette meurtrière du jardinier a produites. Si les détails dans lesquels, je viens d’entrer, ne sont pas une démonstration rigoureuse du peu de durée du pêcher à plein vent, leur résultat est au moins probable ; d’ailleurs, je les donne pour ce qu’ils sont, & si l’on veut avoir la complaisance de m’en communiquer de meilleurs, je les recevrai avec reconnoissance.


CHAPITRE IV.

De la multiplication & du perfectionnement des espèces de pêches, par les semis & par la greffe.


Plusieurs pavies & quelques pêches se reproduisent d’elles-mêmes par le noyau, & elles n’ont pas besoin de greffe ; il n’en est pas ainsi d’une très-grande quantité d’autres espèces, si l’art ne venoit à leur secours, les arbres donneroient de très mauvais fruits.

Dans la majeure partie de nos provinces, un cultivateur est bien embarrassé lorsqu’il veut se procurer de bons fruits. Il a à redouter l’infidélité du pépiniériste, sur la qualité qu’il demande, les sujets défectueux qu’on, lui envoie, la reprise plus qu’incertaine des arbres dont les racines sont écourtées, meurtries & abymée suivant la détestable, mais expéditive méthode d’enlever les arbres de terre ; l’éloignement des lieux, le temps que les arbres restent en chemin, pendant lequel ils souffrent ; enfin, une dépense souvent très-forte & quelquefois au-dessus de ses facultés. Il est donc plus prudent pour lui, plus économique, & en tout sens plus avantageux d’établir, dans son jardin, une pépinière proportionnée à l’étendue de ses besoins. Dès-lors, la multiplication des sujets par les semis, est ce qui lui convient. (Consultez à ce sujet le mot Pépinière)

Je ne fais trop pourquoi les pepiniéristes ne sont pas d’amples semis de noyaux de pêche, afin de les greffer dans la suite. De tels arbres sont, disent-ils, plus sujets a la gomme que les autres ; cela peut être dans certains cantons ; mais cette assertion qui a passé pour une maxime fondamentale est-t-elle bien fondée ? Si on considère les pêchers, les pavies, les persais venus naturellement de noyaux dans les vignes, on ne les voit pas plus chargés de gomme que les autres, à moins que des causes extérieures ne concourent à sa production. Un pareil pêcher s’est trouvé chargé de gomme, il en a eu l’année d’après, ce qui est dans l’ordre & une suite très-ordinaire de son état de souffrance pendant l’an-