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en laisse au côté fougueux beaucoup de branches & de bourgeons, dussent-ils faire un peu confusion. Au contraire, on soulage amplement le côté foible ; par ce moyen le côté fort étant plus chargé, fait un emploi de séve plus considérable que si on le tenoit court. »

» L’oranger a une sorte d’inclination à pousser des branches longuettes, à larges feuilles, qui se rabattent horizontalement & tombent sur les inférieures. Beaucoup de branches fortes, dont les feuilles larges & épaisses abondent de sucs nourriciers, se renversent pareillement sur celles du dessous. On remédiera à ces inconvéniens en taillant court & les mettant sur un œil du dehors pour faire éclore des bourgeons montant perpendiculairement. »

» Une des perfections des orangers, outre leur figure ronde & régulière, est d’être également pleins par-tout. Il en est où se trouvent des vides causés par la mortalité ou par la fracture des branches. Comment réparer ces défauts ? Voici ce qu’un jardinier intelligent ne manque pas de faire. Le vide se rencontre dans le haut de l’arbre, dans son contour, ou dans le bas ; si c’est dans le haut, le jardinier prend deux petites baguettes qu’il attache en croix au milieu de la partie vide, & y amène les branches voisines. On remédie aux lacunes des contours, en attirant avec des osiers ou des joncs les branches les plus proches vers le côté défectueux. On fait la même chose dans le bas, où l’on force un peu avec un osier fort, & jamais avec du fil d’archal, les gros bois, pour les amener, de façon que les branchages se rapprochent par leur extrémité. »

» Il arrive encore à l’oranger de produire des branches fortes & bien nourries qui ne sont pas néanmoins des gourmands. Comme elles dérangent sa belle ordonnance, & que l’arbre est d’ailleurs suffisamment rempli, il faut les supprimer. Quantité de petits jets ont poussé en juillet & en août aux aisselles des branches fortes ; on a négligé de les ôter lors de l’ébourgeonnement ; & plusieurs ont grossi & se sont aoûtés (voyez ce mot) ; c’est encore à la taille qu’ils doivent être retranchés. »

» Les jardiniers, pour avoir plutôt fait, cassent ces jets : pratique vicieuse dont les suites sont de petites esquilles qui nuisent à l’œil voisin, font difformité & causent par la suite, en se séchant, une sorte de petit chancre. On aura l’année précédente laissé des gourmands ou des branches de faux bois à certains endroits garnis de bois mesquin : c’est au temps de la taille qu’on coupe ces derniers & qu’on se retranche sur les premiers. Il faut, autant que la régularité de l’arbre le permet, tailler un peu long ces sortes de bois, & les charger en leur conservant quelques-uns de leurs bourgeons du bas, sauf à les retailler en ravalant quand ils auront jeté leur feu.

» Quoique nous conseillons de faire prendre aux orangers cette forme de calotte ou de dôme qui plaît si généralement, néanmoins nous ne croyons pas qu’il faille sacrifier leur santé ni leur fécondité. L’utilité peut s’allier avec une certaine décoration. Nous connoissons beaucoup de jardiniers dont les arbres, sans être parfaitement symétrisés, ne sont point difformes, & qui leur rapportent par an des sommes considérables.

§. II. De l’ébourgeonnement. Les