Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/621

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on se sert alors du terme de morfondre, pour exprimer ce qui se passe dans les plantes ; il leur arrive ce que nous éprouvons nous mêmes, quand passant subitement d’un excès de chaleur à un froid saisissant, nous sommes frappés de flexion de poitrine ; il se fait alors un mélange, un bouleversement d’humeurs par la répercussion de la matière de la transpiration. La même chose arrive dans les plantes, & c’est delà que vient cette maladie fatale aux pêchers[1], que l’on appelle la cloque ou brouissure. »

« On dit encore sève morfondue en parlant des greffes enterrées : ainsi quand par l’impéritie & la mal-adrese du jardinier, dont il n’est presqu’aucun qui sache planter, la greffe est enterrée, la sève qui passe par ces greffes, abreuvée par l’humidité de la terre, ne peut être que morfondue. Les greffes des arbres sont faites pour recevoir les impressions de l’air, comme les racines sont faites pour recevoir l’humidité de la terre, & non pour l’air ; ainsi les racines sont faites pour l’humide & périront à l’air, de même les greffes se trouvent fort mal d’être enterrées & morfondues dans la terre. On ne peut trop insister sur ce sujet à raison de son importance, & parce que le mal est presque universel.


MORFONDURE. Médecine Vétérinaire. En Languedoc, la plupart des maréchaux, & presque tous les paysans, appellent de ce nom toute maladie dans laquelle le cheval, l’âne & le mulet sont dégoûtés, ont le poil terne & hérissé, sur-tout à la queue, sans toux ni flux par les naseaux, ni engorgement des glandes lymphatiques de la ganache ; ils sont dans l’erreur, puisque d’après une expérience journalière, la morfondure est une affection semblable au rhume simple de l’homme, avec toux, écoulement de mucosité, comme dans la gourme, (Voyez ce mot) d’abord limpide, séreux & abondant dans le commencement, épais à la fin, tristesse, perte d’appétit, & qui dégénère quelquefois en morve, (Voyez ce mot) si elle est négligée ou mal traitée.

Les causes les plus ordinaires de cette maladie sont le froid : si un cheval, par exemple, après avoir eu chaud, est exposé au froid, au vent & à la pluie, la transpiration qui se fait à la tête, est tout-à-coup supprimée, la peau se condense, les pores se resserrent, & l’humeur de la transpiration refluant dans le nez, il en nait la morfondue. Les boissons trop fraîches respectivement à l’état de l’animal, peuvent occasionner aussi cette maladie.

Quelquefois la difficulté de respirer est si considérable, que la vie de l’animal est en danger. Nous avons vu dans un cheval de carrosse, appartenant à M. l’évêque de Lodève, une difficulté de respirer si forte, à la suite d’un froid que cet animal avoit éprouvé, qu’il ne pouvoit rien avaler, &, pour le tirer du danger dont il étoit menacé, nous fûmes obligés de lui faire ouvrir la jugulaire, malgré le préjugé du cocher, qui dans

  1. Note de l’Éditeur. Je ne suis pas d’accord avec M. Roger de Schabol sur la cause de cette maladie. Voyez les motifs de cette différence, rapportés au mot CLOQUE.