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à cette cause intérieure & non à des causes extérieures, comme fracture ou luxation des parties, piquures d’insectes, &c. &c. On voit déjà combien cette interprétation exacte, jette de jour, & dissipe la confusion qui règne dans cette partie.

D’après cette définition, la nature nous offre dans le règne végétal quatre genres de monstres ; le premier renferme ceux qui sont nés tels par la conformation extraordinaire de quelques-unes de leur parties ; le second comprend les plantes qui ont quelques-uns de leurs organes ou de leur membre autrement distribués que dans l’état naturel. Dans le troisième genre, il faut placer les plantes monstrueuses par défaut, ou qui ont moins de parties qu’il ne leur en faut ; & dans le quatrième, les plantes monstrueuses par excès, ou celles qui ont plus de parties qu’elles ne doivent en avoir. Il faut encore ajouter, que parmi ces monstruosités, les unes se perpétuent, soit par les graines, soit par les greffes, tandis que les autres sont passagères & n’altèrent en aucune manière les individus auxquels les plantes monstrueuses ont donné naissance.

Quelques botanistes ont regardé les variétés dans les feuilles de certaines plantes, les panachures, &c. comme des monstruosités ; mais d’après la définition que nous venons de donner, c’est improprement que l’on donne le nom de monstres à ces accidents.

Les greffes par approche, ne sont pas non plus des monstruosités, soit qu’elles aient lieu naturellement, soit artificiellement : car l’union de deux plantes ainsi greffées subsiste sans détruire en rien les loix de la végétation. Ces plantes hybrides se nourrissent, croissent & se régénèrent par graines & par boutures ; en un mot, elles remplissent toutes leurs fonctions végétales à l’ordinaire. Tout est dans l’ordre de la nature, rien contre ses loix ; par conséquent, point de monstruosités, d’autant plus que la plantule, en sortant de la graine, n’offre pas de tiges greffées naturellement, ce qui seroit nécessaire pour constituer un monstre. Si des greffes par approche étoient des monstres naturels, je ne vois pas pourquoi les greffes ordinaires ne le seroient pas aussi. (Voyez le mot Greffe)

Il faut en dire autant des monstres par accidents ; ce n’en sont pas de véritables. Les météores, les vents, les déchirures, les meurtrissures, les insectes occasionnent très-souvent sur la surface des tiges, des feuilles & même des fleurs des plantes, des accidents très-variés, comme la brûlure, des protubérances, des rachitismes, &c. qui ne sont que des maladies. (Voyez les mots Brûlure, Gale) La gallomanie elle-même ne paraissant que dans le cours de la vie de la plante, est plutôt une maladie qu’une monstruosité. Si elle paroissoit dès le moment de la naissance & du développement du fœtus, alors elle en seroit une véritable, parce que, comme nous le verrons plus bas, c’est dans les vices du fœtus qu’il faut chercher le vrai principe des monstruosités.

Section III.

Exemples de monstruosités végétales.

Nous allons parcourir les principaux exemples de véritables mons-