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la durée des combinaisons qui rendent les huiles douces, agréables, & saines ; & même d’enlever les principes créateurs de leur saveur & de leur odeur désagréable.


Section Première.

De la conservation & rectification des Huiles de graines.


J’aurois pu faire entrer dans le Chapitre de la fabrication des huiles de graines, ce que je vais dire sur l’extraction des principes d’où dépendent leur mauvais goût & leur mauvaise odeur ; mais ces détails auroient détourné l’attention du lecteur, de la suite des procédés de la fabrication de ces huiles ; d’ailleurs, les procédés dont j’ai parlé, ne changent en rien les manipulations ordinaires.

J’ai à détruire dans les huiles de graines (celle de pavot exceptée), 1°. un goût naturel, âcre & désagréable qu’il faut bien distinguer de la rancidité, & qui dépend de son esprit recteur. 2°. Indépendamment de ce principe, un second qui existe dans le parenchyme même de ces graines, & que l’huile combine. Ce n’est pas une vraie résine, mais une résine sous la forme & la combinaison savonneuse, formant le corps qu’on appelle gommo-résineux. Si on doute de son existence, on peut appliquer à ces graines, l’éther vitriolique. Les résines dissoutes ont un goût âcre qui n’est pas la source de la rancidité dans les huiles grasses, quoiqu’il puisse y contribuer en partie.

On diminue de beaucoup l’odeur & l’âcreté naturelles aux graines, en les semant dans un terrain sablonneux. On doit cette observation à M. Dalibard : cet estimable physicien a reconnu que les semences des plantes odoriférantes qui contiennent toutes de l’esprit recteur & des huiles essentielles éthérées, ont produit des plantes dénuées de ces propriétés, quoiqu’on les ait transplantées ensuite dans une terre plus fertile, & dans laquelle ces mêmes plantes ont coutume de conserver ces propriétés, lorsqu’elles y sont germées. Cette méthode est d’autant plus aisée à suivre, qu’on est dans l’usage de transplanter les jeunes plants de choux, de navette, &c., du terrain où les graines ont germé, dans celui où on les cultive. Cette pratique, quoique très-bonne, ne remplit pas toutes les vues de correction relatives à l’objet présent. Je réponds, d’après l’expérience, du fait avancé par M. Dalibard.

Voici un procédé plus sûr, plus commode & plus général. Faites macérer à froid les graines, dans une lessive de cendres ordinaires faite à froid, dont le véhicule est de l’eau de chaux ordinaire. Une livre de bonne chaux suffit pour faire cent livres d’eau de chaux, que l’on emploie pour lessiver trois ou quatre livres de cendres, plus ou moins, suivant leur qualité alcaline. Il suffit dans la macération, que la liqueur surnage un peu la graine. Toute autre dissolution alcaline, faite dans l’eau de chaux, comme des cendres gravelées, de soude, de potasse, &c. (voyez ces mots), remplissent le même but. J’ai indiqué les cendres par économie, & l’eau de chaux même n’est conseillée que pour aiguiser & rechausser l’action alcaline & employer moins de cendres.