Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/339

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’analogie qui se trouve entre la vie & l’accroissement de la plante & de l’animal, il seroit possible de trouver dans l’organisation de chacune des parties, une humeur qui lui est particulière, ou plutôt de démontrer que c’est la même humeur, mais différemment modifiée, soit par les sécrétions, soit par la diversité & la configuration des vaisseaux qui y portent la nourriture. La greffe est un trait frappant du perfectionnement des sucs par le simple changement de conformation dans la direction des couloirs ou vaisseaux séveux. Je dis plus : je pense qu’il est possible de démontrer que la matière de la transpiration du tronc diffère de celle des feuilles, des fleurs, des fruits, & ainsi successivement ; & il est déjà même très-bien prouvé que la matière de la transpiration des plantes n’est pas la même pendant le jour que pendant la nuit ; il en est encore ainsi de l’espèce d’air qu’elles laissent échapper. Dans le végétal comme dans l’homme, chaque partie a sa sécrétion particulière ; les yeux ont les larmes ; le nez, les oreilles, &c. ont leurs humeurs propres. Pourquoi de semblables sécrétions, mais analogues aux plantes, n’existeroient-elles pas, puisqu’il y a une si grande analogie entre le végétal & l’animal ?

Je dis donc que le mucilage est plus essentiel à l’écorce qu’à tout le reste de la plante ; qu’il facilite l’ascension & la descente de la sève, & qu’il y fait les mêmes fonctions que le velouté ou le glaireux, ou le mucilagineux qui tapisse notre estomac, nos intestins, &c. Dans le corps de l’homme & de l’animal, il empêche les érosions, émousse les frottemens. Si les choses sont effectivement ainsi que je les présente, on doit regarder la gomme comme une simple maladie de la peau, une simple extravasions du suc qui lui est propre. Plusieurs raisons m’invitent à le croire ; par exemple, si à un abricotier, un prunier, je fais autour d’une branche une ligature avec une corde, la branche en grossissant formera dans cet endroit un bourrelet, & à mesure de sa croissance, cette corde sera ensevelie & cachée par ce bourrelet, mais il n’y aura point de gomme. Si, au contraire, en formant cette ligature, j’écorche, je meurtris cette écorce, la gomme surviendra au temps de la sève ; si par une contusion, un coup, une déchirure, j’altère l’écorce, il y aura de la gomme dans cet endroit. Si j’ampute une grosse branche après l’hiver, & que la plaie ne soit pas recouverte avec l’onguent de St. Fiacre, la gomme suintera tout autour de la plaie, parce que la cicatrice ne sera pas encore formée, &c, &c.

Examinons actuellement un des effets de variations subites de l’atmosphère, du chaud en froid, & considérons l’effet des gelées tardives ou du printemps sur les bourgeons (voyez ce mot) des arbres à fruit à noyaux, & supposons-les au moment qu’ils sont chargés de fleurs. Si la gelée survient sans pluie, ni les fleurs ni les fruits ne seront pas endommagés ; si le temps est humide, pluvieux ou neigeux, & sur-tout si le soleil paroit, les fleurs & même les fruits noués sont perdus. Le sommet des bourgeons périt également, parce qu’il commence à pousser, & qu’il est plus