Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/228

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on sème ensuite le blé ; mais l’expérience a appris que cette récolte manquoit souvent, lorsque les pluies n’étoient pas fréquentes depuis les mois d’avril jusqu’à celui de juin. Pour remédier à cette perte réelle & souvent complète, on a pris le parti de semer avec le blé & en même temps que lui, le salicor ou kali dont on retire la soude par incinération. (voyez ce mot) Si une récolte manque, l’autre réussit parfaitement. De ce fait il est facile de tirer des conséquences : le blé prospère lorsque les pluies sont fréquentes, & par conséquent lorsqu’elles ont dissous ce sel, & qu’elles ont entraîné la surabondance qui lui préjudicie, parce qu’il dessèche & corrode les racines, le collet de la tige, &c. enfin, parce que la végétation du blé exige que ce principe salin soit uni à des substances graisseuses pour composer les matériaux savonneux de la sève & qu’il n’y soit pas prédominant. Les pluies, en détruisant la surabondance, maintiennent les principes dans l’équilibre favorable à la végétation. Le salicor, au contraire, prospère pendant les sécheresses, parce que son principe de végétation exige beaucoup de sel ; aussi l’être suprême l’a placé au bord de la mer, & non dans l’intérieur des terres, de même qu’il a placé le saule au bord des eaux & non sur le sommet des montagnes desséchées. Par le même principe que le blé a bien végété, le salicor périt, & il prospère lorsque le blé est détruit. La culture de la soude peut avoir lieu dans l’intérieur du royaume ; dans ce cas, l’engrais salin & multiplié produira d’excellens effets.

Avant de généraliser, suivant la coutume des écrivains, il auroit fallu spécifier les cas dans lesquels les engrais purement salins sont avantageux. Que les sels soient acides, alcalis ou neutres, peu importe ; tous concourent à la végétation jusqu’à un certain point, & même assurent de très-bons effets, si on sait les appliquer à propos. Je préfère les sels alcalis & les sels neutres aux sels purement acides, parce que ces deux premiers & le premier sur-tout se combinent plus facilement avec les substances huileuses végétales ou animales, & en outre, ils ont la propriété spéciale d’absorber une plus grande quantité d’humidité de l’atmosphère qui les dissout, les fait tomber en déliquescence & s’approprier, d’une matière plus immédiate, les sels ou principes vivifians de l’atmosphère.

L’avantage des sels, comme sels, je le repère, résulte de leur union avec les matières grasses & de leur combinaison en état savonneux. Si le sel prédomine sur ces substances, il sera destructeur du végétal qui demande moins de principe salin que tel autre : la preuve en est dans l’expérience citée au mot ARROSEMENT.

Je ne répéterai point ce qui a été dit aux mots Craie, Chaux, Cendre, qui sont des engrais purement salins ; ce sont des articles essentiels à consulter, & qui aideront à se former une idée juste de leur manière d’agir & du degré de confiance qu’on doit avoir sur les écrits de certains auteurs.

Les engrais salins ferreux, tels que la craie, la marne, les cendres, la suie, les démolitions des vieux bâtimens, sur-tout en pisay & en plâtre, les boues des rues, des grands chemins, les vases des mares, des