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exige plus de soin, & il faut que de chaque châtaigne il en sorte un arbre, surtout lorsqu’on ne se propose pas de grandes plantations ; malgré cela on peut faire des pépinières en grand.

Elles doivent être établies sur un terrein meuble, frais, situé, s’il est possible, au bord des ruisseaux ou des rivières, un peu à couvert des vents par des haies vives, ou par des arbres placés à certaine distance, & on est sûr d’avoir de belles productions. Après avoir bien préparé le terrein, l’avoir bien ameubli, on le dispose en planches, on plante les châtaignes sur des raies droites, à six pouces les unes des autres, & on les enterre à trois pouces de profondeur, au commencement de novembre. Si la terre a de la consistance, il vaudra mieux attendre la fin de février ou le commencement de mars, parce que les pluies d’hiver la resserreroient, au point que le germe ne pourroit se faire jour à travers une terre devenue trop compacte.

Il faut bien se garder d’amender la terre de la pépinière ; je conviens que la végétation du jeune arbre seroit plus forte, plus vigoureuse ; mais comme il est destiné à être un jour planté dans un terrein maigre, & ne trouvant plus alors cette première nourriture, sa reprise seroit difficile, & sa végétation languissante. Il faut laisser la ressource perfide des amendemens aux marchands d’arbres, à qui il importe fort peu que, dans la suite, l’arbre réussisse ou non, pourvu qu’ils le vendent & en retirent de l’argent. Les seuls soins que la pépinière exige, sont de la tenir très-propre, de la débarrasser de toute plante parasite ; & dans le cas d’une sécheresse, de lui accorder, à la rigueur, quelques légers arrosemens.

Après la première année, tous les plants sont levés de terre sans endommager, châtrer ni mutiler les racines, & portés ensuite dans des fosses ouvertes depuis un mois ou deux, & même plus. Il s’agit, au moment de la transplantation, de retirer de la fosse la terre qui y est tombée, & d’en travailler le fond par un coup de bêche. Pendant ce temps, la terre jetée sur les bords, & celle de la fosse se sont imprégnées des eaux des pluies, l’action du soleil y a excité la fermentation ; enfin tous les météores les ont imprégné de leurs heureuses influences. (Voyez le mot Amendement) Chaque arbre doit être éloigné de trois pieds de son voisin. (Voyez au mot Racine les soins qu’on doit en avoir) Si on veut s’épargner les frais de cette seconde pépinière, on peut semer dans des raies distantes de trois pieds l’une de l’autre, & laissant un pied & demi d’intervalle entre chaque arbre, sur l’alignement du sillon. L’arbre restera ainsi en pépinière jusqu’à la quatrième ou cinquième année. Pendant cet intervalle, les branches latérales seront supprimées avant le renouvellement de la sève du printemps ; la tige s’élèvera alors perpendiculairement, & l’arbre se trouvera en état d’être transplanté à demeure. Il n’est pas besoin de dire que chaque année, le terrein de l’une ou de l’autre pépinière doit être travaillé au moins deux fois ; sans ces précautions, la végétation seroit presque nulle.

Il est inutile d’entrer ici dans les