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du systême vasculaire, se développe graduellement dans toutes les parties de la machine animale. En peu de mots, voici sa théorie ; elle paroît si vraisemblable, qu’elle a presque l’air de la vérité, au moins est-ce le systême le plus probable que nous ayons. Le sang contient du phlogistique, (ou feu principe) ; l’action des vaisseaux dans lesquels le sang séjourne, s’épure & circule, développe ce phlogistique ; ce développement ne peut se faire sans production de chaleur, & la chaleur ainsi produite suffit, suivant ce savant, pour rendre compte, non-seulement de la chaleur des animaux vivans, mais encore des phénomènes les plus frappans qui l’accompagnent.


Section V.

De la chaleur végétale.


Nous avons démontré au mot Arbre, (voyez ce mot) que l’observateur pouvoit remarquer une très-grande analogie entre les animaux & les végétaux : nous trouvons ici encore un terme de comparaison non moins intéressant, & non moins frappant que dans les autres parties. Les végétaux sont doués d’un certain degré de chaleur qui leur est propre, qu’ils peuvent diminuer ou augmenter jusqu’à un certain point : parlons plus exactement ; il y a dans le végétal un principe particulier purement mécanique, qui est cause que la chaleur de ses parties intérieures varie en raison de la température de l’air qui l’environne. Cette chaleur propre a été révoquée en doute par quelques observateurs, sur-tout par le docteur Martine. Mais le raisonnement, & quelques observations & expériences de MM. Hunter & de Buffon, vont nous prouver que la nature est uniforme, & que dans tous les êtres qui ont une vie, elle a placé une certaine mesure de chaleur pour principe d’existence.


§. I. Expériences qui découvrent son existence.

Si nous jetons un coup-d’œil sur les plantes, les arbrisseaux, & les arbres au sortir de l’hiver, nous voyons que toutes les plantes herbacées, très-délicates par leur nature, éprouvent des accidens cruels par l’effet des gelées ; les jeunes tiges, les pousses encore tendres se gèlent & périssent, mais le tronc ou le cœur de la plante résiste souvent aux plus grands froids ; les bourgeons gèlent très-rarement. Dans les régions alpines, où un froid perpétuel semble étendre un empire absolu, la mort paroît régner, pendant neuf mois de l’année, sur tout ce qui vivoit auparavant : le printems, ou plutôt l’été vient-il répandre ses douces influences, la mort n’étoit qu’apparente, tout revit bientôt, tout renaît, & ces mêmes plantes, dont les rameaux étoient flétris par la gelée, retrouvent dans leurs tiges & dans leurs racines, les sucs nécessaires à une réproduction nouvelle. Dans les parties les plus septentrionales de l’Amérique, où le thermomètre est souvent à trente & trente-six degrés au-dessous du zero, où l’on sait que quelquefois les pieds des habitans se gèlent, & que les nez tombent par le froid, cependant le sapin, le bouleau, le genevrier, &c. n’en sont point affectés. Comment peut-il se faire que ces végétaux échappent à la rigueur de la saison, s’ils n’ont pas en eux-mêmes un principe de chaleur toujours subsistant, qui s’affoi-