Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/671

Cette page a été validée par deux contributeurs.

alors de beaux sujets. Quelques-uns enlèvent ces pieds dans les forêts, les transplantent dans leurs jardins, & les y greffent. Plusieurs cherchent moins de façon ; ils greffent leurs sujets dans les bois mêmes, & lorsque la greffe a bien repris, ils transplantent & vendent l’arbre. M. Duhamel remarque que la greffe se décolle facilement sur cette espèce de merisier : il veut sans doute parler de la greffe en écusson ; mais je n’ai rien observé de semblable sur la greffe en fente, (voyez le mot Greffe) même sur les merisiers dans les bois. Il ne faut pas, il est vrai, que ce sujet se trouve étouffé par d’autres grands arbres ; & j’avoue que les pépiniéristes dont l’habitation n’est pas éloignée des forêts, doivent préférer ce dernier parti : il est pour eux plus économique que les autres.

Il seroit satisfaisant de savoir le nom du premier amateur qui, à force de soins, est parvenu à se procurer le merisier à fleur double, & comment il y est parvenu, ou enfin, si cette précieuse variété est due au hasard. Il diffère du premier seulement par ses fleurs doubles, c’est-à-dire, chargées de pétales comme la rose, & disposées de la même manière ; de sorte que la fleur, par elle-même, est isolée & très-agréable à la vue, & infiniment plus encore, lorsque l’on considère l’arbre qui en est chargé : il devient le plus bel ornement des bosquets du printems. On voit ordinairement les fleurs simples qui deviennent doubles par excès de soins & de nourriture, perdre les parties de la génération, c’est-à-dire, les étamines & les pistils. Ici c’est tout le contraire, les étamines sont en grand nombre, le pistil est monstrueux ; en conséquence il ne se change pas en fruit. On peut donc dire que les fleurs ont toutes les parties de la génération, & que si elles sont infécondes, c’est à cause du vice d’organisation.

II. Merisier à gros fruit noir. Cerasus major sylvestris fructu cordato nigro, subdulci. Duh.

M. Duhamel regarde ce merisier comme une variété du précédent. Je suis fâché de ne pas être du sentiment de ce grand homme : la différence totale de la manière d’être de l’arbre & de son fruit, établit un caractère très-marqué ; d’ailleurs je ne crois même pas qu’elle soit due à la culture, puisque j’ai trouvé ces merisiers dans des forêts très-éloignées de toute habitation. Il est certain que si l’on considère cet arbre d’après les idées que les botanistes se sont faites des genres, des espèces & des variétés, il est clair qu’on ne le regardera que comme une simple variété ; mais alors il faudroit condamner toutes les autres espèces de cerisiers à subir la même loi, & même, à l’exemple de M. von Linné, les engloutir toutes dans le genre du prunier. L’agriculture est obligée de subdiviser plus que le botaniste.

La fleur du merisier à gros fruit noir est moins grande que celle du précédent, ses pétales plus arrondis, un peu rougeâtres ou veinés, & son calice d’un rouge vif.

Son fruit a la peau noire, fine, luisante, la chair tendre, d’un rouge foncé, très-vineuse, douce & sucrée, adhérente au noyau.

Ses feuilles sont d’un vert plus brun, & leurs nervures rougeâtres.

Les bourgeons (voyez ce mot, ainsi que celui de Bouton) différent des premiers par leur couleur plus