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enterrés. La plaie faite par l’amputation sur la tige, sera aussitôt couverte d’onguent de S. Fiacre. (Voyez ce mot) On sent aisément sur quoi cette loi est fondée. La bouture n’est entretenue fraîche que par son union avec la terre ; or, la partie qui resteroit hors de terre seroit desséchée par les vents, par le soleil, puisqu’il n’existe encore aucune racine pour faire monter la séve jusqu’au haut de la tige, & aucune feuille sur la tige pour la faire descendre à l’endroit des racines. Si on suppose actuellement que quelques racines commencent à pousser, les sucs qu’elles pomperont de la terre ne seront pas suffisans pour monter jusqu’au sommet de la tige, sur-tout lorsque le hâle a oblitéré les canaux conducteurs de la séve. Au contraire, en coupant la tige à un œil ou deux au-dessus du sol, l’humidité de la terre entretient fraîche la partie saillante, & la séve se porte directement & sans peine, au premier ou au second bouton. Pour vérifier ce fait, j’ai mis en terre cinquante boutures de platanes ; quarante-huit sont restées dans toute leur longueur, & deux ont été coupées près de terre. Les quarante-six sont mortes, les deux autres ont poussé au sommet un bourgeon maigre & grêle, tandis que les deux boutures coupées ont poussé des bourgeons de quatre à cinq pieds de longueur. J’ai répété la même opération sur des oliviers, & le résultat a été le même. Il est inutile de dire que les soins donnés à ces boutures ont été uniformes, & que toutes ont été plantées dans un terrain égal.

En terminant cet article, il est bon de rapporter la cause d’une contestation au sujet de la manière de préparer les boutures, & dont certains papiers publics s’occupèrent il y a quelques années. La question se réduisoit à savoir, s’il falloit tailler en pointe les boutures, en laissant un côté franc avec l’écorce, ou s’il falloit tailler l’extrémité inférieure parfaitement circulaire. Il ne s’agissoit que de s’entendre, & les deux méthodes sont bonnes. Si la bouture est d’un bois commun, comme le saule & le peuplier, & qu’il faille l’enfoncer profondément en terre, il est presque indispensable, pour accélérer l’opération, de tailler en pointe le plançon ou plantard, parce que taillé circulairement à sa base, il resteroit peut-être des vides au fond du trou qu’on avoit préparé pour le recevoir ; d’ailleurs, celui qui est taillé en pointe s’enfonce plus aisément, plus profondément ; & si en descendant, il trouve un obstacle, comme une pierre, &c. il est facile de l’éviter en tournant la pointe du plançon du côté opposé à la pierre ; mais si la bouture est d’un bois délicat, si elle est mise dans une terre légère, alors la coupe circulaire à la base a l’avantage de présenter plus d’écorce, par conséquent moins de parties du bois seront à découvert ; il y aura plus d’écorce, & par conséquent plus de place pour former le bourrelet, & plus de bourrelet pour pousser des racines.

Les jardiniers pépiniéristes appellent boutures, les branches qui sortent de terre au pied de l’arbre. Les unes naissent du tronc, les autres des racines, Elles sont nommées