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donne naissance aux bourrelets ; mais n’est-il pas aussi à craindre que ces incisions ne deviennent à la longue autant de gouttières ? alors le remède seroit pire que le mal.

III. Des avantages que l’on peut retirer des bourrelets. La nature ne fait jamais rien en vain, & si nous ne voyons pas toujours le terme où elle tend, c’est notre faute & non pas la sienne. Les fibres qui composent les branches & les racines, sont absolument indifférentes à produire des branches ou des racines. (Voyez Branche, Racine). On le remarque principalement dans les mamelons qui percent à travers les bourrelets & qui deviennent à volonté des branches chargées de feuilles ou des racines traçantes, suivant les circonstances. Si on étête un arbre, & qu’on ait soin de le dépouiller de tous ses rejetons, on verra sortir d’entre le bois & l’écorce, un gros bourrelet qui donnera naissance à de petits bourgeons. De même, si l’on coupe une des principales racines de cet arbre & qu’on recouvre de terre le chicot, il se formera pareillement entre le bois & l’écorce un bourrelet, d’où sortiront de petites racines. Mais si le chicot n’est point recouvert de terre, & qu’il soit à l’air, le bourrelet produira des bourgeons. Ces vérités sont démontrées par les expériences faites par MM. Duhamel & Bonnet de Genève : le hasard m’a servi encore mieux, & a confirmé absolument ce que ces savans avoient vu. En me promenant dans une lisière de forêt dont on abattoit quelques arbres en les déracinant, j’ai trouvé un arbre à moitié déraciné, & je ne sais quelle raison l’avoit fait abandonner depuis environ un an. Une racine de huit à dix pouces de diamètre avoit été coupée, & un éboulement avoit rapporté de la terre contre elle, de façon qu’il y en avoit à peu près cinq pouces d’enterrés. Ainsi, sa moitié environ étoit à l’air, tandis que l’autre étoit recouverte de terre. Du bourrelet supérieur D, (Fig. 7) partoient trois bourgeons assez vigoureux. Je fus d’abord surpris de voir une racine chargée de branches, mais me rappelant bientôt ce que j’avois lu dans M. Duhamel, je fus curieux de voir si le bourrelet inférieur F avoit repoussé des racines ; je le déterrai & j’en trouvai deux, avec chacune une bifurcation. Le même tronçon de racine produisoit donc en même tems & des bourgeons & des racines. Au mot Branche, nous verrons le même phénomène végétal.

Dans la Fig. 9, les mamelons A B C D E F, sont autant de germes, de racines ou de bourgeons, suivant la position du bourrelet dans l’air, ou dans la terre.

Cette vérité bien démontrée, conduit nécessairement à conclure que lorsqu’on voudra planter des boutures, on y réussira plus aisément lorsqu’on aura fait pousser des racines à un bourrelet artificiel qu’on pourra produire à volonté, si l’on arrache de terre une bouture qui ait déjà poussé des racines ; en l’examinant attentivement on verra que ces racines sont des productions du bourrelet qui s’est formé entre le bois & l’écorce. Les boutures de saule, de peuplier,