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à 18. Ces proportions de degrés doivent être regardées comme générales, & non pas prises à la rigueur.

Supposons actuellement que l’eau dont on se sert pour arroser, soit l’eau d’une fontaine qui vienne de loin par des canaux très-profonds. Si on plonge dans cette eau un thermomètre dont la graduation soit régulière & égale au premier, on trouvera que la chaleur de l’eau de cette fontaine n’excèdera pas onze à douze degrés ; & si elle est ce qu’on appelle parfaitement bonne, ou froide, elle aura précisément dix degrés & un quart de chaleur.

Il est aisé de tirer actuellement les conséquences sur les effets qui résultent de cette différence de température entre l’eau, la terre qu’on arrose, & les plantes qui végétent : elle sera pour le matin, environ de sept degrés ; à midi, de 10 ; & à trois heures de l’après-midi, de 14. On peut juger par soi-même de l’impression fâcheuse que les plantes éprouveront par l’arrêt de leur transpiration : (voyez ce mot) organisées à peu près comme l’homme, elles sont sujettes aux mêmes maladies. Eh ! qui ignore les suites fâcheuses d’une transpiration arrêtée ?

Si on arrose avec de l’eau dont la chaleur soit de 60 à 80 degrés, & que celle de la terre soit de 18, & même de 25 & 30, il est constant que ce passage subit, cette alternative de froid & de chaud, relativement à la différence des degrés, attaquera la plante, détruira sa texture extérieure qui renferme & défend toute son organisation, & agira encore bien plus fortement sur celle des racines, beaucoup plus tendres & plus poreuses, que sur celle des tiges ou des feuilles. La nature ne connoît point d’extrêmes dans la marche de la végétation. Imitons-la donc.

L’eau pour l’arrosement doit être d’une température égale à celle du terrain qu’on veut arroser, à quelque heure que ce soit de la journée. Je ne parle pas de l’hiver lorsqu’il gèle, puisqu’on n’arrose plus alors. Pour cet effet, tirez le soir l’eau qui doit servir pour le lendemain matin ; elle se mettra pendant la nuit, à la température de l’atmosphère. Tirez le matin celle dont vous vous servirez quelques heures après, & à trois heures de l’après-midi, celle destinée pour l’arrosement du soir au soleil couchant. Ce genre d’arrosement suppose dans le jardin un ou plusieurs dépôts d’eau découverts afin d’accélérer le travail ; si le jardin en est dépourvu, c’est au maître vigilant à les faire construire sans délai. Une fosse d’une certaine étendue, dont le fond & les côtés seront corroyés avec de l’argile sur un pied d’épaisseur, évitera la dépense de la maçonnerie, & la maçonnerie même ne retiendra pas l’eau, à moins qu’elle ne soit faite en béton ou en pouzzolane. (Voyez ces mots)

2o. Quels principes doit contenir l’eau destinée aux arrosemens ? La meilleure eau est celle qui cuit parfaitement les légumes & dissout complétement le savon ; l’eau séléniteuse (voyez ce mot) est la plus mauvaise, parce qu’elle est pétrifiante. Les eaux qui coulent des mines, qui tiennent du cuivre en dissolution, sont exécrables & tuent