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L’avantage de cette méthode est de ne pas augmenter les frais de la main d’œuvre, à moins qu’on ne compte pour quelque chose l’opération de semer, & la perte du grain. Celle du grain seroit un objet important, si on employoit, par exemple, du blé assez bon pour être vendu ; mais comme il s’agit seulement d’avoir de l’herbe, tous les grains de rebut sont mis à profit, & même jusqu’à la semence du foin, dont on ne tire aucun avantage.

Aussitôt que l’herbe du printems sera enterrée, laissez reposer la terre & se cuire au soleil des mois de Juillet & d’Août. En Septembre & Octobre, labourez suivant la méthode ordinaire pour ensemencer la terre lorsque la saison sera venue.

Ce que je viens de dire est contradictoire avec les méthodes que les auteurs ont publiées, d’après lesquelles il ne faut pas laisser croître une seule plante, parce que, disent-ils, sa nourriture épuise la terre, & c’est une soustraction de subsistance pour les plantes qui couvriront le champ après elles. Cette contradiction s’explique en partie. Si l’herbe que je conseille de semer grainoit sur pied, ce seroit effectivement une perte pour le champ, & la terre renfermeroit dans son sein un amas de semences dont la germination & la végétation nuiroient à la récolte ; elles deviendroient alors des plantes vraiment parasites : mais ici on ne leur donne pas le tems de grainer, & elles sont enfouies à cette époque. Il en résulte donc un terreau, une vraie terre végétale, principe de toute production. Ce terreau s’unit à la glaise, en divise les molécules, les tient écartées, & favorise l’écoulement des eaux. Tout le monde sait qu’une plante rend plus à la terre qu’elle n’en a reçu. (Voyez le mot Amendement) Dès-lors cet engrais commence à remplir les vues d’amélioration de l’argile, sans augmenter la dépense de culture ; & si chaque année de jachère il est répété, on parviendra successivement au but qu’on desire. Suffit-il de tenir la terre bien labourée & bien meuble ? ce point sera discuté au mot Labour. J’ai l’expérience de ce que j’avance ; je prie d’en faire l’essai en petit, & on se décidera sur le résultat.

3o. Les fumiers. Je comprends sous cette dénomination la chaux, la marne, le plâtre & les fumiers des écuries. (Voyez ces mots) Les trois premiers contiennent un sel alcali, (voyez ce mot) & par leur mélange le principe d’adhésion des parties de la glaise est détruit. Les uns & les autres, ils en soulèvent les parties, & donnent à l’eau un passage plus libre. Les fumiers d’écurie les plus pailleux sont les meilleurs, parce qu’ils sont plus long-tems à se décomposer, & tiennent les terres plus long-tems soulevées. Si au lieu de paille on faisoit aux bestiaux des litières avec des joncs, des bruyères, des genêts, des feuilles de buis, &c. ce fumier seroit à préférer. Il s’imprègne fortement des sels & des parties graisseuses contenus dans les excrémens des animaux. Semblables à une éponge, ils les retiennent, & sont comme autant de petits leviers qui empêchent la réunion des molécules. Ce fumier doit être enfoui le plus profondé-