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duira la pointe du fer avec l’extrémité du doigt, dans la crainte d’attaquer ou de couper quelque partie qui ne seroit pas une bride. C’est une délicatesse ou une retenue déplacée de s’astreindre à faire de petites ouvertures. La coupure est seulement une plaie simple que la nature guérit sans le secours de l’art, & l’ouverture trop étroite ne laisse pas au pus un passage suffisant, & oblige souvent d’en faire de nouvelles.

VI. Il arrive des cas où les contre-ouvertures sont d’une nécessité absolue. Quelquefois la position de l’abcès ne permet pas de donner l’issue que l’on desireroit ; d’autres fois, à cause des poches ou sacs dans lesquels le pus séjourne, s’accumule & produit des ravages affreux. Dans ce cas, la contre-ouverture sera pratiquée sur l’endroit où la pente entraîne naturellement le pus, & même on en pratiquera plusieurs, si le besoin l’exige. Cette opération est à tous égards préférable aux bandages expulsifs, aux injections, &c. qui, le plus souvent, ne servent qu’à faire traîner le mal en longueur.

VII. Lorsque l’abcès est ouvert, le premier point est de faire écouler le pus en pressant légérement sur les deux côtés des lèvres de la plaie. 2o. D’essuyer l’ulcère avec de la filasse de chanvre bien cardée, bien douce & très-propre ; de changer les bourdonnets faits avec cette filasse, jusqu’à ce que l’ulcère soit convenablement desséché. 3o. De garnir la cavité de l’ulcère avec des bourdonnets ou plumasseaux de la même filasse douce, fine & mollette ; ces plumasseaux absorberont le pus à mesure qu’il se forme dans l’ulcère, & l’empêcheront de ronger les chairs. 4o. Lorsque les cavités en sont garnies, il faut appliquer par-dessus des plumasseaux épais, trempés dans une décoction de plantes vulnéraires, (voyez ce mot) légérement éguisée par un peu de sel marin. 5o. Retenir ces plumasseaux par des compresses à plusieurs doubles & fortement imbibées de cette décoction vulnéraire. 6o. Les tenir assujetties par un bandage convenable. 7o. Avoir soin de les humecter plusieurs fois par jour sans déranger l’appareil. 8o. Panser l’animal seulement une fois par jour, & laisser, le moins qu’il sera possible, la plaie exposée à l’action de l’air, enlever les bourdonnets, les plumasseaux, dessécher l’ulcère, & le bien nettoyer avec la décoction vulnéraire. 9o. À mesure que le fond de l’ulcère se rétrécit, diminuer le volume des bourdonnets, &, dans aucun cas, ne forcer pour le faire entrer, ni en employer de trop gros, parce qu’ils souleveroient & tirailleroient trop les chairs. 10o. S’il survient des chairs baveuses sur les bords de la plaie, il suffit de les toucher avec le vitriol ou avec la pierre infernale, & d’augmenter la dose de sel de cuisine dans la décoction ; on peut même y ajouter un peu d’eau-de-vie. Si au contraire les bords de la plaie sont trop enflammés, durs, calleux, les décoctions des plantes émollientes seront très-utiles.

Les Maréchaux emploient communément les onguens digestifs pour le pansement des ulcères. Je crois qu’il est très-possible de s’en