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LES FÊTES DU PEUPLE

grand peuple assemblé… Un système de fêtes bien entendu serait à la fois le plus doux lien de fraternité et le plus puissant moyen de régénération. — Ayez des fêtes générales et plus solennelles pour toute la République ; ayez des fêtes particulières, et pour chaque lieu, qui soient des jours de repos, et qui remplacent ce que les circonstances ont détruit. — Que toutes tendent à réveiller les sentiments généreux qui font le charme et l’ornement de la vie humaine : l’enthousiasme de la liberté, l’amour de la patrie, le respect des lois… Qu’elles puisent leur intérêt et leurs noms mêmes dans les événements immortels de notre Révolution et dans les objets les plus sacrés et les plus chers au cœur de l’homme…

Et il fit adopter un décret instituant l’ensemble de ces Fêtes,[1] et chargeant les comités de Salut public et d’Instruction publique d’en élaborer l’organisation.

Le 20 prairial an II, — 8 juin 94, — eut lieu la première de ces fêtes : la Fête de l’Être Suprême, que le modéré Boissy d’Anglas chantait, quelques jours après, le 12 messidor, — 30 juin, — dans son Essai sur les fêtes nationales,[2] adressé à la Convention. Puis, le 26 messidor, fut fêté le 14 Juillet.

  1. Voir les Documents de la fin, numéro I.
  2. 118 pages in octavo. C’est là que se trouve la phrase, souvent rappelée depuis à Boissy d’Anglas, qui l’eût volontiers oubliée : « Robespierre, parlant de l’Être Suprême au peuple le plus éclairé du monde, me rappelait Orphée enseignant aux hommes les premiers principes de la civilisation et de la morale. » — Boissy d’Anglas y propose un grand nombre de fêtes consacrées « aux principaux actes de la vie civile » : naissances, mariages, enterrements, fêtes des aïeux, commémorations historiques, anniversaires républicains, fêtes des récompenses, où l’on porterait au Panthéon les morts illustres, et où l’on inscrirait les grands noms sur des colonnes. « Bientôt cette solennité serait la fête de l’Europe ; bientôt l’univers vous accorderait l’initiative de la gloire. » — Boissy d’Anglas adressa cet essai à Florian, qui en fut ravi.
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