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Nouvelle série. — Tome III.
15 Septembre 1883.
N° 9.

REVUE PÉDAGOGIQUE

L’INSTRUCTION PRIMAIRE EN CORSE (1883)



Il y a bientôt trente ans, j’abordais pour la première fois en Corse, échappé de l’école pour devenir maître à mon tour ; j’y trouvais des élèves intelligents, de bons amis, un beau ciel. une admirable nature, les plaisirs de la première liberté et ceux du premier enseignement : si bien que les deux années que je passai là-bas restèrent dans ma mémoire claires et gaies entre toutes. Me voici revenu en ce même pays, ma carrière et ma vie déjà avancées, avec de nouveaux devoirs, plus étendus et plus sévères ; je retrouve des amitiés fidèles, le même beau ciel, la même admirable nature : mais il faut ne pas me laisser prendre par ce brillant décor, rechercher ce qu’il couvre, écarter les charmantes images de jeunesse, aller aux choses mêmes, et virilement, fût-ce au prix de déceptions, me mettre en face de la réalité. Si mes fonctions ne m’en faisaient un devoir, j’y serais porté par la seule force des habitudes que l’esprit contracte avec l’âge.

I

D’abord quelques chiffres empruntés à la statistique ; c’est une première source d’informations, un premier contact avec la réalité.

Le département de la Corse comptait au dernier recensement 212,639 habitants, soit 9,938 de plus qu’en 1876, et 14,132 de plus qu’en 1812. Sa population, lors de la réunion à la France en 1768, n’était que de 120,389 habitants ; par une suite de progrès continus, elle a depuis lors plus que doublé. Cette vitalité contraste heureusement avec les signes d’alanguissement