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REVUE PÉDAGOGIQUE.

II. — LEÇONS PRATIQUES.

LA LANGUE MATERNELLE.


Un bon enseignement de la langue maternelle est la base de l’éducation populaire : d’abord parce que tout homme, dans quelque humble position qu’il se trouve, a besoin d’être en communication avec ses concitoyens ; ensuite, parce que cette connaissance de la langue lui permettra d’accroître, par la lecture et le travail personnel, l’instruction qu’il aura reçue dans son enfance. Voilà des raisons directes, tirées de l’utilité pratique.

Mais il en est d’autres fondées sur l’étude des facultés intellectuelles et qui, pour ne pas être aussi évidentes, ne sont ni moins réelles, ni moins importantes. Qu’on veuille bien y réfléchir : la pensée ne saurait exister sans les mots qui l’expriment ; ce que nous ne pouvons nommer est pour nous comme s’il n’était pas. Le mythe des pierres se mouvant aux sons de la lyre d’Amphion pour former les remparts de Thèbes, reste une figure très-exacte de la puissance des mots pour former les idées, et par suite pour mettre toutes choses au pouvoir de l’homme. « On ne saurait dire tout ce que l’esprit acquiert en acquérant le langage. Ses impressions confuses se classent ; il en acquiert la conscience d’abord et ensuite la connaissance réfléchie. Un appareil lui est fourni avec lequel il opère comme un artisan avec ses outils. Il n’y a pas en effet de comparaison plus exacte que celle-ci : les mots sont pour l’esprit de