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LIVRE SIXIÈME.


DU BEAU[1].


I. Le beau affecte principalement le sens de la vue. Cependant l’oreille le perçoit aussi, soit dans l’harmonie des paroles, soit dans les divers genres de musique : car des chants et des rhythmes sont également beaux[2]. Si nous nous élevons du domaine des sens à une région supérieure, nous retrouvons également le beau dans les occupations, dans les actions, dans les habitudes, dans les sciences, aussi bien que dans les vertus. Y a-t-il encore une beauté supérieure ? c’est ce que nous découvrirons par la discussion. Quelle est donc la cause qui fait que certains corps nous paraissent beaux, que notre oreille écoute avec plaisir des rhythmes qu’elle juge mélodieux, que nous aimons des beautés purement morales ? La beauté de tous les objets dérive-t-elle d’un principe unique, immuable, ou bien reconnaîtrons-nous tel principe de beauté pour le corps, tel autre pour une autre chose ? Quels sont alors ces principes, s’il y en a plusieurs ? Quel est ce principe, s’il n’y en a qu’un ?

D’abord il y a des objets, les corps par exemple, chez lesquels la beauté, au lieu d’être inhérente à l’essence même du sujet, n’existe que par participation ; d’autres au contraire sont beaux par eux-mêmes : telle est, par exemple,

  1. Pour les Remarques générales, Voy., à la fin du volume, la Note sur ce livre.
  2. Voy. Platon : Phèdre, p. 250 ; Ier Hippias, p. 295 ; Philèbe, p. 17.