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SECOND ALCIBIADE

devaient faire pour détourner les maux présents, l’interprète, pour toute réponse b(le dieu n’en permettait évidemment pas d’autre), appela l’envoyé et prononça : « Voici ce qu’Ammon dit aux Athéniens : les louanges des Lacédémoniens lui plaisent beaucoup plus que tous les sacrifices des Grecs ». Ce fut tout, il n’ajouta pas autre chose. Par ces louanges, le dieu me paraît signifier tout simplement leur prière : elle diffère, en effet, notablement des autres. Car les autres Grecs, ceux-ci en offrant les bœufs caux cornes dorées, ceux-là, en consacrant aux dieux leurs riches oblations, demandent tout ce qui leur passe par la tête, bien ou mal. Aussi les dieux, entendant leurs prières blasphématoires, n’agréent ni ces processions, ni ces sacrifices somptueux. C’est pourquoi, à mon avis, on doit considérer avec beaucoup de soin et de réflexion ce qu’il faut dire ou ne pas dire.

Tu trouveras chez Homère d’autres exemples analogues. Le poète raconte, en effet, dque les Troyens en établissant un camp

Sacrifiaient aux immortels de parfaites hécatombes

et l’odeur des victimes s’élevait de la plaine, portée par les vents vers le ciel, odeur

Suave, mais au festin les dieux ne prirent part,
Ils refusèrent, tant ils abominaient la ville sainte d’Ilios
eEt Priam et le peuple de Priam à la vibrante lance[1].

Ainsi leurs sacrifices étaient inutiles, leurs offrandes, vaines, puisque les dieux les haïssaient. Je ne crois pas, en effet, qu’il soit dans la nature des dieux de se laisser séduire par des présents comme un méchant usurier ; mais nous dirions

    public, lorsqu’ils doivent entreprendre une guerre, et c’est avec peine qu’ils contribuent aux frais. Comme la plus grande partie des terres appartient à des Spartiates, ils ne surveillent pas leurs contributions mutuelles, et ainsi le législateur a obtenu un résultat tout contraire à l’intérêt [général], car il a appauvri la ville et rendu les particuliers avides de richesses (τὴν μὲν γὰρ πόλιν πεποίηκεν ἀχρήματον, τοὺς δ' ἰδιώτας φιλοχρημάτους. Polit. Β, 6, 1271 b, 1 et suiv. — Voir tout le chapitre vi). — Pour ces motifs, le roi Archidamos s’efforçait de détourner ses compatriotes d’engager les hostilités contre Athènes en 432 (Thucydide I, 80). L’auteur d’Alcibiade II croit au contraire à la richesse de la ville elle-même, et Platon dans Alcib. I est encore plus explicite (122 c-123 b).

  1. Iliade, VIII, 548-552.