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NOTICE

Le second
Alcibiade et les
dialogues
de Platon.

Si rien ne prouve que le dialogue provienne du milieu de la nouvelle Académie, il est cependant incontestable qu’il se rattache à l’école platonicienne. L’auteur, comme nous l’avons montré, s’est inspiré surtout du premier Alcibiade et lui emprunte, avec le titre, quelques développements importants. D’autres écrits du Maître ont été mis à contribution. La discussion, réfutée du reste dans la suite, qui tend à identifier sottise (ἀφροσύνη) et folie (μανία), repose sur le principe qu’à un contraire un seul contraire peut s’opposer (138 c, 139 b). Il est difficile de ne pas reconnaître là une réminiscence de Protagoras, où une thèse analogue est discutée à partir du même principe (332). Comment ne pas songer aussi à l’exégèse des vers de Simonide (Protagoras, surtout 343 b-344 b), en lisant celle qu’entreprend le pseudo-Platon à propos des vers homériques (147 b et suiv.) ?

D’ailleurs, la structure même du petit dialogue où se succèdent toutes les variétés de composition, discours suivis, commentaires de poètes, discussion dialectique d’allure capricieuse et parfois paradoxale, rappelle assez la manière des premiers écrits platoniciens. On y retrouve aussi la doctrine socratique telle que Platon l’exposait dans sa jeunesse. Mais l’art, la souplesse, la richesse d’imagination et de vocabulaire, l’habile mise en scène de Protagoras, de Lachès ou de Charmide, manquent ici presque totalement. Aucun souci de l’intérêt dramatique, aucune description de lieu ou de personnages, aucune de ces finesses malicieuses qui animent d’une vie si intense les dialogues authentiques. L’auteur apocryphe n’a guère emprunté à son modèle que ses idées et certains procédés, sans lui dérober le secret de son charme littéraire[1].


La conception
de la prière.

La doctrine religieuse du second Alcibiade ne diffère pas tellement de celle de Platon, quoi qu’en dise Bickel[2]. Est-il exact que l’argumentation du dialogue apocryphe se fonde

  1. On remarquera la fréquente répétition des mêmes formules et le peu de variété du style : v. g. 138 c et 140 b ; 139 a, e ; 144 d, 145 d, 146 b ; voir encore les nombreuses formules commençant par ὁρᾷς ou ὁρᾷ, 141 c, 144 c, 145 a, 146 d, 150 c.
  2. Art. cit. p. 466, et du même, Platonisches Gebetsleben, dans Archiv für Gesch. der Phil., 1908, p. 538.