V
LA DATE DU CRATYLE
SA PLACE DANS L’ŒUVRE DE PLATON
Le Cratyle ne contient aucune indication extérieure ni sur le moment où le dialogue est censé avoir lieu, ni sur l’époque de sa composition. On est mieux renseigné sur ce dernier point par les caractères du style et par le contenu de l’ouvrage. Personne ne songe plus à y voir une des premières œuvres de Platon, comme le faisait Stallbaum[1] en le plaçant vers 402, avant la mort de Socrate, ou comme Cucuel[2]. Le Cratyle doit avoir suivi l’Euthydème[3], dont il est inséparable, et probablement à peu d’intervalle. Il se rattache d’autre part au groupe formé par le Parménide et le Théétète[4], mais il est sûrement antérieur à ces dialogues, qui reprennent avec plus d’ampleur, pour les soumettre à une critique décisive, quelques-uns des problèmes soulevés par le Cratyle. Or le Théétète[5] semble avoir été écrit après 369, et n’a peut-être été publié qu’après le second voyage de Sicile (367). Le Cratyle doit l’avoir précédé de plusieurs années. On y trouve esquissée, mais avec réserve, la théorie des Formes, et pour la première fois l’auteur montre que le caractère immuable de ces Formes est une condition nécessaire de leur connaissance. Mais elles ne sont pas encore, comme dans le Phédon, un monde à part, séparé du domaine des choses sensibles, et le Cratyle ne laisse rien soupçonner de cette gradation qui, d’après le Banquet, doit par une série d’étapes conduire de l’objet sensible à la Forme intelligible et parfaite. On peut en conclure que le Cratyle est antérieur au Banquet, composé vers 385 environ[6] et au Phédon. Si, d’autre part, il se place à la suite de l’Euthy-
- ↑ O. l., p. 26.
- ↑ O. l., p. 25.
- ↑ Wilamowitz, o. l., p. 286. Le Cratyle, 386 d, cite comme connu un sophisme d’Euthydème.
- ↑ Horn, o. l., p. 272 sq.
- ↑ Voir la notice du Théétète, par A. Diès, p. 121.
- ↑ L. Robin, Notice du Banquet, p. xi.
