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PHÈDRE

l’une qui est due à des maladies humaines, l’autre, à un état divin qui nous fait sortir des règles coutumières.

Phèdre. — b Absolument, ma foi !

Socrate. — Quant au délire divin, nous l’avons divisé en quatre sections qui relèvent de quatre dieux, rapportant à Apollon l’inspiration divinatoire, à Dionysos l’inspiration mystique, aux Muses l’inspiration poétique, la quatrième enfin à Aphrodite et à l’Amour ; nous avons alors proclamé l’excellence supérieure de l’amoureux délire[1]. Et voici que, je ne sais comment, tandis qu’en nous faisant une image de l’émotion amoureuse nous mettons probablement la main sur quelque vérité, mais peut-être bien aussi nous fourvoyons-nous d’un autre côté[2], voici que, ayant ainsi composé un mélange oratoire qui n’était pas tout à fait sans force persuasive, c c’est d’une sorte d’hymne mythologique que nous avons, en un badinage plein de convenance et de piété[3], fait honneur à celui qui est ton maître comme le mien, Phèdre, à l’Amour sous la garde de qui sont les beaux garçons !

Phèdre. — Un hymne, ma parole ! qu’il ne m’a pas du tout déplu d’entendre.

La méthode dialectique.

Socrate. — Voici donc la leçon que nous avons à tirer de cet hymne même, de la manière, dis-je, dont le discours fut à même de passer du blâme à l’éloge.

Phèdre. — Comment l’entends-tu donc ?

Socrate. — Pour moi c’est évident : dans le reste nous n’avons réellement fait que jouer un jeu ; mais, dans ces choses qu’une heureuse fortune nous a fait dire, il y a deux façons de procéder dont d il ne serait pas sans intérêt, supposé qu’on le puisse, de comprendre techniquement la fonction.

Phèdre. — Et quelles sont-elles ?

Socrate. — La première : vers une forme unique mener,

  1. Socrate a dit en effet que l’amour est un délire ; que le prophétisme est une illumination exceptionnelle ; que la divination inspirée n’a rien de commun avec l’art augural ; que l’ouvrier en poésie n’est pas un poète ; qu’il n’y a pas d’amour sans un élan désintéressé du cœur ; il a distingué quatre espèces du délire (244 a sqq., 249 d sqq.). Mais cette théologie du délire est nouvelle.
  2. Dans le rappel lyrique des visions abolies ? Dans les allusions au dérèglement de l’amour ? Plutôt parce qu’un mythe n’est pas la vérité.
  3. Le contenu de l’hymne est un mythe et ce mythe est un jeu ;