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NOTICE

déb. ; cf. 277 b 6 et 262 b fin) ; il n’y a pas en effet d’autre moyen de rester, dans la déduction des conséquences, conséquent avec soi-même. — La seconde démarche est donc l’inverse de celle-ci : elle consiste à spécifier l’unité définie dont elle part, et elle cherche à reconnaître quelles formes sont enveloppées dans sa nature et dépendent de cette nature ; on découpe l’unité selon ses articulations naturelles, autrement dit selon ses espèces[1]. L’unité dont il s’agit est en effet comparable à celle d’un être vivant : le découpage ne doit donc pas se faire à l’aventure, mais selon la division naturelle des membres, dont l’ensemble solidaire exprime la constitution de cette individualité vivante. De même que nous y voyons une semblable partie, œil, oreille, bras, jambe exister à droite et exister à gauche, de même, après avoir dit indistinctement que l’amour est un délire, nous nous sommes aperçus que, après avoir dans le premier discours vilipendé l’amour en tant que délire, on l’a dans le second loué au contraire, et encore en tant que délire. Or cette façon de passer du blâme à l’éloge à l’intérieur d’une forme cependant commune (cf. 265 ac), est particulièrement instructive. Elle montre que, dans cette forme commune, il doit y avoir une espèce gauche et une espèce droite : un délire humain et un délire divin, un amour qui est une sous-espèce de cette première espèce de délire, et un autre amour qui est une des formes comprises dans la seconde espèce. Cette seconde espèce comporte d’ailleurs des sections, dont tout le monde admet qu’elles en sont des manifestations particulières (244 a sqq., 265 b) ; ce qu’il s’agit de faire en établissant que l’amour droit est un amour inspiré des dieux, c’est d’introduire en elle une subdivision de plus. Cette spécification, ajoute Platon, devra se poursuivre jusqu’à ce qu’on ait atteint l’espèce indivisible (277 b) ou, ce qui revient au même, la forme de la chose envisagée[2], car

  1. Le rapprochement avec Cratyle 387 a, par lequel G. Rodier (Sur l’évolution de la dialectique de Platon, dans Études de philosophie ancienne, p. 62) veut indiquer que là-dessus le Phèdre n’apporte aucune nouveauté, est tout extérieur. À cet endroit il est en effet question, d’une façon très générale, de l’action de couper, puis de l’action de brûler, mais pour signifier enfin que l’action de nommer ne peut se faire n’importe comment ni, non plus, à l’aide de n’importe quel instrument.
  2. On voit ici assez bien comment se fait le passage de εἶδος, la