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NOTICE


Deux épilogues possibles du drame.

Aux péripéties qui ont marqué ce drame d’un amour, dont on a reconnu qu’il est un véritable amour puisqu’il est un délire, il ne reste plus qu’à donner un épilogue. Or celui-ci sera différent selon la manière dont se seront dénouées ces péripéties, soit par l’impudence brutale chez l’amoureux et l’abandon complaisant chez l’aimé, soit par le triomphe chez l’un comme chez l’autre de la raison et de la sagesse. Ainsi ce qui reste à considérer, ce sont les effets de l’amour selon la façon dont il aura évolué, c’est l’utilité ou le dommage qui peuvent en résulter, comme disait Socrate dans son premier discours (cf. 238 e et p. 18 n. 3), mais cette fois à propos du véritable amour, de celui qui est un délire. Il y a donc, on le voit, deux épilogues possibles. — Le premier (256 a 7 sqq.) est celui d’un amour qui a été soumis à l’ordre et orienté vers la philosophie, dans lequel l’autorité a appartenu à ce qu’il y a de meilleur dans l’âme, qui a comporté la maîtrise de soi et la mesure, qui a asservi les éléments capables de corrompre cette âme où il y a du mauvais et du bon, qui inversement a libéré ce qui est capable d’empêcher que le mauvais ne l’emporte sur le bon. Après une existence terrestre faite d’harmonie et de bonheur, les amants de cette sorte ont délesté leur âme de ce qui l’appesantissait, et celle-ci, à l’heure où elle quittera son corps, montera portée par ses ailes vers sa patrie céleste. Elle y reprendra, et même définitivement, sa place originelle quand, deux fois encore, elle aura remporté la même victoire sur les désirs sensuels, antagonistes de la raison (cf. p. 54 n. 1). Il n’est pas de bien plus grand que puissent conférer, ni une sagesse pratique humaine, ni tout autre délire divin[1].

  1. Platon veut ici distinguer entre les bienfaits du délire d’amour quand le caractère divin en aura été sauvegardé par son application philosophique, et ceux des autres délires dont il a parlé 244 a-245 a : ceux-ci ne sont en effet bienfaisants que par rapport aux choses d’ici-bas. Même ainsi limitée, leur bienfaisance est cependant supérieure à celle des techniques humaines raisonnées, qui en sont de grossières contrefaçons (244 cd). À plus forte raison en doit-il être ainsi d’une forme du délire qui a été proclamée supérieure à toutes les autres (249 e déb. ; cf. 245 b fin). — Il me semble d’autre part moins probable que, comme le suggère Z. Diesendruck (p. 11, 13, 14), la sagesse humaine dont il est ici question soit celle dont le premier