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PHÉDON

bien laideur que maladie. À la parure que fait à la terre véritable la foule de ces gemmes, s’ajoutent encore, et l’or, et l’argent, et le reste enfin de ce qui est 111 de même sorte. Parure qui d’elle-même et par nature se découvre aux regards si abondante, si grandiose, si universellement répandue sur la terre, que celle-ci est un spectacle fait pour des spectateurs bienheureux !

« Pour ce qui est des animaux qu’elle porte, le nombre est grand de ceux qui ne sont pas les mêmes qu’ici. Et quant aux hommes, les uns en habitent le milieu ; les autres, au bord de l’air comme nous au bord de la mer ; d’autres, dans des îles[1] baignées tout autour par l’air et reposant sur la terre ferme. En un mot, ce que sont justement pour nous l’eau et la mer en vue de nos besoins, c’est l’air qui l’est là-bas ; b tandis que ce qu’est l’air pour nous, l’éther l’est pour ces hommes-là. Il y a dans le climat dont ils jouissent un si parfait tempérament qu’ils sont exempts de maladies et que, pour la durée de la vie, ils dépassent de beaucoup les hommes d’ici-bas. Pour la vue, pour l’ouïe, pour la pensée, pour toutes les fonctions analogues, ils sont de nous à une aussi grande distance que, pour la pureté, l’air l’est de l’eau et l’éther, de l’air. Il va de soi qu’ils ont pour les Dieux bosquets sacrés[2] et sanctuaires, et qui servent réellement de résidence à des Dieux ; des voix aussi, des prophéties, par lesquelles les Dieux se rendent sensibles à eux ; et, de la sorte, ils entrent en commerce avec eux, c face à face. Ajoutons même que le soleil, la lune, les astres sont vus par eux tels qu’ils peuvent bien être en réalité. À ces privilèges s’ajoute une félicité qui en est l’accompagnement.

« Ainsi donc, telle est la nature de la terre en son ensemble et de ce qui appartient à la terre. Quant à ses régions intérieures, elles en continuent les parties creuses et sont disposées circulairement, en grand nombre, par rapport à l’ensemble. Les unes sont plus profondes et plus largement

    terrestre ; non passé comme celui de l’Âge d’or (le règne de Cronos, Polit. 269 a-274 d ou Lois IV, 713 a-714 d), mais actuel et réservé aux saints et aux philosophes (114 bc).

  1. Les Îles des Bienheureux : cf., entre beaucoup d’autres, Pindare, Olymp. II, 77 sqq.
  2. Ou plus largement, avec une autre leçon, « leurs demeures ».