Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome II.djvu/230

Cette page a été validée par deux contributeurs.
200 b
121
LACHÈS

autres et tu oublies de te regarder. Quant à moi, je crois m’être convenablement expliqué sur le sujet en discussion, et si j’ai faibli sur quelque point, j’espère me corriger avec l’aide de Damon, que tu railles sans le connaître même de vue, et auprès de quelques autres. Lorsque j’aurai réparé mes faiblesses, je te ferai part de mon savoir très largement ; car tu me parais avoir beaucoup à apprendre.

Lachès. — Tu es un savant, Nicias. Cependant je conseille à Lysimaque et à Mélésias, au sujet de l’éducation de leurs fils, de nous souhaiter le bonjour à tous deux, mais de garder Socrate, comme je le disais au début ; et pour moi, si mes enfants étaient encore en âge, c’est cela même que je ferais.

Nicias. — Je t’accorde volontiers que, si Socrate consent à prendre soin de ces jeunes gens, ils n’ont pas à chercher plus loin. Je serais le premier à lui confier Nicératos[1], s’il le voulait bien ; mais chaque fois que je lui en parle, il me propose quelque autre et se dérobe[2]. Vois donc, Lysimaque, si tu sauras mieux te faire écouter de Socrate.

Lysimaque. — Ce serait justice, car je ferais pour lui, moi aussi, bien des choses que je ne consentirais à faire que pour peu de gens en dehors de lui. Que décides-tu, Socrate ? Te rends-tu à ma prière et veux-tu aider ces jeunes gens à devenir meilleurs ?


Conclusion.

Socrate. — Il serait coupable, Lysimaque, de refuser son aide à qui désire devenir meilleur. Si donc, dans cet entretien, j’avais fait preuve de science et ceux-ci d’ignorance, c’est à bon droit que tu m’inviterais à remplir cette tâche. Mais en fait, nous sommes tous restés en détresse. Qui donc choisir entre nous ? Personne, à mon avis. Les choses étant ainsi, voici mon conseil ; vous jugerez ce qu’il vaut. J’estime que nous devons tous ensemble — personne ne trahira notre secret — chercher

  1. Sur Nicératos, cf. plus haut p. 91, n. 1 (179 b).
  2. On sait que telle était l’habitude de Socrate lorsqu’on lui demandait des leçons proprement dites, ou lorsque la curiosité vraiment philosophique semblait manquer à celui qui recherchait son aide. Donner des leçons et se les faire payer était à ses yeux le propre du technicien, s’il s’agissait d’une science véritable, ou le propre du sophiste, s’il s’agissait d’une science vaine, bornée à de simples apparences.