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ALCIBIADE

Socrate. — Et ce n’est pas en devenant riche qu’on échappe au malheur, c’est en devenant sage ?

Alcibiade. — Cela est évident.

Socrate. — Par conséquent, Alcibiade, ce n’est pas de murs, ni de trières, ni de chantiers que les villes ont besoin pour être heureuses, ni de population, ni de grandeur, si la vertu leur manque ?

Alcibiade. — Non, certainement.

Socrate. — Dès lors, si tu dois gérer les affaires de la république comme il faut, ce qu’il est nécessaire que tu donnes à nos concitoyens, c’est la vertu.

Alcibiade. — Sans aucun doute.

Socrate. — c Mais est-il possible de donner ce qu’on n’a pas ?

Alcibiade. — Comment le donnerait-on ?

Socrate. — De sorte qu’il te faut d’abord acquérir toi-même de la vertu, et c’est aussi le devoir de quiconque veut gouverner et administrer non seulement sa propre personne et ses intérêts à lui, mais aussi sa ville et les intérêts publics.

Alcibiade. — Tu dis vrai.

Socrate. — Ainsi, ce qu’il faut t’assurer, ce n’est pas la liberté de faire en maître absolu, pour toi et pour la république, ce qui te plaît ; non, mais la justice et la sagesse.

Alcibiade. — Cela est hors de doute.

Socrate. — Car si vous agissez avec justice d et sagesse, toi-même et la république, vous plairez aux dieux par vos actions.

Alcibiade. — Il y a lieu de le croire.

Socrate. — Et, comme nous le disions tout à l’heure, vous aurez toujours en vue dans vos actions ce qui est divin et lumineux[1].

Alcibiade. — Sans aucun doute.

Socrate. — Or, en l’ayant ainsi devant les yeux, vous vous verrez et connaîtrez vous-mêmes, vous et ce qui est bon pour vous.

Alcibiade. — En effet.

Socrate. — Et alors vous vous conduirez comme il faut.

  1. Cf. ci-dessus 133 c. Les mots employés ici semblent se rapporter plus particulièrement au passage dont l’authenticité est suspecte ; toutefois ils peuvent aussi faire allusion à ce qui le précède.