Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/247

Cette page a été validée par deux contributeurs.

incroyable combien de temps il se conserve presque entier ; [80d] et lors même qu’il se corrompt, certaines parties néanmoins, comme les os, les nerfs et toutes les autres semblables, sont presque immortelles : cela n’est-il pas vrai ?

Très vrai.

L’âme donc, qui est immatérielle, qui va dans un autre lieu semblable à elle, excellent, pur, immatériel, et que, pour cette raison, on appelle avec vérité l’autre monde[1] auprès d’un Dieu bon et sage, où bientôt, s’il plaît à Dieu, mon âme doit se rendre aussi ; l’âme, dis-je, étant telle et de telle nature, à peine sortie du corps, se dissiperait et périrait, ainsi que le disent la plupart [80e] des hommes ! Il s’en faut de beaucoup, ô Cébès, ô Simmias ! Voici plutôt ce qui arrive : si elle sort pure, sans entraîner rien du corps avec elle, comme celle qui, durant la vie, n’a eu avec lui aucune communication volontaire, mais l’a fui au contraire et s’est recueillie en elle-même, faisant de cette occupation son unique soin ; et ce soin est ce-

  1. Il y a ici, comme un peu plus loin, dans le texte, un rapprochement verbal, intraduisible en français, entre le mot qui signifie immatériel, ἀείδης, et celui qui signifie, l’autre monde, ἅδης, l’invisible, le lieu de l’invisible. Voyez, sur l’étymologie du mot ἄδης, ἀίδης, le passage célèbre du Cratyle.