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115 ac
Le waw avec les formes verbales finies

comēdit et bibit (où les deux actions sont censées simultanées) et dans comēdit et ivit cubitum (où la seconde action est postérieure à la première), l’hébreu distingue ces deux et, dont le second équivaut à et postea. Dans une phrase comme divide et impera où le et équivaut logiquement à ita ut (sic) imperes = et sic imperabis (consécution), et (en conséquence) tu régneras ou à ut imperes (finalité), afin que tu règnes, l’hébreu distingue une nuance modale du waw (consécutive ou finale)[1].

Au point de vue logique on peut donc distinguer un et de pure coordination et un et nuancé de succession, de consécution, de finalité. Nous appelons le premier « et simple » et le second « et énergique ».

b La langue arabe peut exprimer ces différences d’une façon assez parfaite, qui aide à faire comprendre les procédés de l’hébreu. Elle a deux formes pour exprimer et : wa وَ et fa فَ[2]. Wa s’emploie pour le et simple, fa pour le et énergique ; pour le et de succession on emploie généralt fa (rarement wa) avec l’indicatif ; pour le et final-consécutif fa avec le subjonctif. Aux diverses distinctions logiques répondent donc des formes distinctes.

c L’hébreu est bien loin de cette perfection de l’arabe. Et d’abord l’hébreu n’a que ו pour exprimer et. Pour rendre les diverses distinctions on ne peut donc songer qu’à deux procédés : une modification du waw ou de la forme verbale. Or ces deux procédés ne se trouvent réalisés que d’une façon imparfaite. Le et simple s’exprime toujours par un ו faible (à savoir sans exigence de redoublement)[3], mais le et énergique n’est pas toujours exprimé par un ו fort (à savoir exigeant le redoublement). Bien plus, on n’a en réalité le ו fort que dans le cas de la forme de succession wayyiqtol « et il tua ». Dans cette même forme, quand les lois phonétiques le permettent, la vocalisation et le ton sont également discriminants. Dans weqatal la différence de valeur du et peut parfois s’exprimer par la place du ton, par exemple

  1. Comparer la double valeur de qui dans : « Venit vir qui (= et is) nuntiavit » et « Venit vir qui (= ut is) nuntiaret ».
  2. Originairement il y aurait forme unique d’après Ewald, Gramm. arab., 1 § 478 ; 2 § 726 sq. ; mais Brockelmann admet deux formes, Grundriss, 1, p. 502.
  3. Cf. § 104 c-d.