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88 L u — 88 M b
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Formes avec préformante ת ; — avec afformantes

u תַּקְטוּל : תַּגְמוּל bienfait, תַּֽעֲגוּג délices, תַּֽחֲנוּנִים prières, תַּמְרוּרִים amertumes. Formes féminines : תַּֽהֲלוּכָה procession, תַּהְפּוּכָה renversement, perversité, תַּֽעֲלוּמָה mystère.

v On rencontre, de plus, certaines formes avec ת secondaire, dont l’origine est obscure : תֶּ֫מֶס liquéfaction provient probablement d’un *tamass > tamas > tams (comp. מֶ֫מֶר § e) ; de même probablement תֶּ֫בֶל souillure, infamie (בלל). Le mot תַּ֫עַר rasoir se rapporte à la racine ערה, תְּעָלָה guérison à עָלָה. Le mot תֹּ֫אַר aspect semble provenir de ראה avec métathèse (comp. מֹ֫רֶךְ § j) : ce serait un taqtul refait en qutl. Le mot תֹּֽאֲנָה prétexte (de אנה) serait un taqtulat refait en qutlat.

§ 88 M. Formes avec afformantes.

a L’afformante *ān devient normalement ọ̄n וֹן. Dans un certain nombre de noms où l’on a ān dans les autres langues sémitiques, on a ◌ָן en hébreu, p. ex. קָרְבָּן offrande. Néanmoins le å ici ne semble pas long, mais seulement moyen[1]. — Sur la finale ◌ָן dans les noms de localités cf. § 91 h.

b Qatalān est composé de qatal + ān. Cette forme d’abstraits devient normalement en hébreu קְטָלוֹן, qu’on a seulement dans רְעָבוֹן famine (?). Ailleurs qatalān a pris un redoublement de la 2e consonne. Ce redoublement secondaire est p.-ê. dû au besoin de conserver les trois voyelles qui donnent à la forme un aspect particulier. Peut-être aussi le redoublement est-il né dans certains noms pour une cause particulière, puis se sera propagé aux autres[2]. La 1re voyelle primitive a n’est conservée que dans שַׁבָּתוֹן chômage, repos, probablement sous l’influence de שַׁבָּת (même sens). (Comparer le nom de ville Ἀκκαρών (akk. Amḳarrûna) en regard de עֶקְרוֹן). Partout ailleurs l’a s’affaiblit en i (qittålọ̄n), sans doute parce qu’il est loin de la syl-

  1. Même difficulté pour l’å de la forme qattål, § H a. On pourrait hésiter pour tel nom qui serait un pur emprunt araméen. Mais même dans עִנְיָן affaire (seult dans l’Ecclésiaste) l’état cst. עִנְיַן indique que l’hébreu a abrégé l’ā long primitif. On trouve encore l’état cst. en ◌ַ pour קִנְיָן, שֻׁלְחָן, קָרְבָּן, אָבְדָּן.
  2. Ainsi עִוָּרוֹן cécité est p.-ê. à l’analogie de l’adj. עִוֵּר et du piel (seule conjugaison) ; עִשָּׂרוֹן décime à l’analogie du piel décimer.