Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/142

Cette page a été validée par deux contributeurs.
132
HISTOIRE DE FRANCE

catéchisme[1], il est élu ; il prend charge d’âmes, il gouverne une province ecclésiastique. Le père vend en son nom les bénéfices, reçoit les dîmes, le prix des messes, sauf à n’en pas faire dire. Il fait confesser ses vassaux, les fait tester, léguer, bon gré, mal gré, et recueille. Il frappe le peuple des deux glaives ; tour à tour il combat, il excommunie, il tue, damne à son choix.

Il ne manquait qu’une chose à ce système. C’est que ces nobles et vaillants prêtres n’achetassent plus la jouissance des biens de l’Église par les abstinences du célibat[2] ; qu’ils eussent la splendeur sacerdotale, la dignité des saints, et, de plus, les consolations du mariage ; qu’ils élevassent autour d’eux des fourmilières de petits prêtres ; qu’ils égayassent du vin de l’autel leurs repas de famille, et que du pain sacré ils gorgeassent leurs petits. Douce et sainte espérance ! ils grandiront ces petits, s’il plaît à Dieu ! ils succéderont tout naturellement aux abbayes, aux évêchés de leur père. Il serait dur de les ôter de ces palais, de ces églises ; l’église elle leur appartient ; c’est leur fief, à eux. Ainsi l’hérédité succède à l’élection, la naissance au mérite. L’Église imite la féodalité et la dépasse ; plus d’une fois elle fit part aux filles, une fille eut en dot un évêché[3]. La femme du prêtre marche près de

  1. Atto de Verceil.
  2. App. 52.
  3. Il y avait en Bretagne quatre évêques mariés : ceux de Quimper, Vannes, Rennes et Nantes ; leurs enfants devenaient prêtres et évêques ; celui de Dol pillait son église pour doter ses filles. (Lettres du clergé de Noyon, 1079, et de Cambrai, 1076, conservées par Mabillon.) — Les clercs se plaignaient