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CELTES ET IBÈRES

débordait et venait à eux, ils ne refusaient pas le combat, et marchaient à lui l’épée à la main. C’était leur point d’honneur de ne jamais reculer ; ils s’obstinaient souvent à rester sous un toit embrasé. Aucune nation ne faisait meilleur marché de sa vie. On en voyait qui, pour quelque argent, pour un peu de vin, s’engageaient à mourir ; ils montaient sur une estrade, distribuaient à leurs amis le vin ou l’argent, se couchaient sur leurs boucliers, et tendaient la gorge.

Leurs banquets ne se terminaient guère sans bataille. La cuisse de la bête appartenait au plus brave, et chacun voulait être le plus brave. Leur plus grand plaisir, après celui de se battre, c’était d’entourer l’étranger, de le faire asseoir bon gré mal gré avec eux, de lui faire dire les histoires des terres lointaines. Ces barbares étaient insatiablement avides et curieux ; ils faisaient la presse des étrangers, les enlevaient des marchés et des routes, et les forçaient de parler. Eux-mêmes parleurs terribles, infatigables, abondants en figures, solennels et burlesquement graves dans leur prononciation gutturale, c’était une affaire dans leurs assemblées que de maintenir la parole à l’orateur au milieu des interruptions. Il fallait qu’un homme chargé de commander le silence marchât l’épée à la main sur l’interrupteur ; à la troisième sommation, il lui coupait un bon morceau de son vêtement, de façon qu’il ne pût porter le reste[1].

  1. App. 1.