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HISTOIRE DE FRANCE

mettre tous les forts entre les mains des Francs, s’étaient armés sous Lope, fils de Guaifer. Au retour, les Francs attaqués par ces montagnards perdirent beaucoup de monde dans ces pors difficiles, dans ces gigantesques escaliers que l’on monte à la file, homme à homme, soit à pied, soit à dos de mulet ; les roches vous dominent, et semblent prêtes à écraser d’elles-mêmes ceux qui violent cette limite solennelle des deux mondes.

La défaite de Roncevaux ne fut, assure-t-on, qu’une affaire d’arrière-garde. Cependant Éginhard avoue que les Francs y perdirent beaucoup de monde, entre autres plusieurs de leurs chefs les plus distingués, et le fameux Roland. Peut-être les Sarrasins aidèrent-ils ; peut-être la défaite commencée par eux sur l’Èbre fut-elle achevée par les Basques aux montagnes. Le nom du fameux Roland se trouve dans Éginhard sans autre explication : Rotlandus præfectus britannici limitis[1]. La brèche immense qui ouvre les Pyrénées sous les tours de Marboré et d’où un œil perçant pourrait voir à son choix Toulouse ou Saragosse, n’est autre chose, comme on sait, qu’un coup d’épée de Roland. Son cor fut pendant longtemps gardé à Blaye sur la Garonne, ce cor dans lequel il soufflait si furieusement, dit le poète, lorsque ayant brisé sa Durandal, il appela, jusqu’à ce que les veines de son col en rompissent, l’insouciant Charlemagne et le traître Ganelon de Mayence. Le traître, dans ce poème éminemment national, est un Allemand.

  1. App. 126.